Je viens devant vous, Jeunes Socialistes m’adresser à la jeunesse de France mais aussi, à tous les français pour les convaincre du changement.
Je suis de nouveau à Strasbourg. Strasbourg est une des capitales de l’Europe, avec Bruxelles et Luxembourg. Elle est le siège du Parlement européen, et vous savez combien je suis attaché à ce que ce siège reste ici. Mais aussi parce que Strasbourg, sous l’impulsion de son maire, Roland Ries, est une ville jeune et innovante. C'est une grande cité universitaire et de recherches. Pensez : Strasbourg, qui nous avait déjà donné un Prix Nobel de chimie en la personne de Jean-Marie Lehn, aura donné un Prix Nobel de Médecine à la France, Jules Hoffmann, pour ses travaux sur le système immunitaire. Permettez moi de saluer, et à travers lui toute la communauté des chercheurs et des savants qui travaillent durement pour faire jaillir la lumière du progrès et la diffusion du savoir qui est indissociable de la démocratie.
Je suis venu vous tenir un langage de vérité, d’espoir et de mobilisation.
La vérité, vous la connaissez, car votre génération est lucide. Cette vérité est difficile. La crise est là, brutale, profonde. Elle a son coeur en Europe. Plus précisément, la zone euro est au centre de la tourmente, et donc la France, qui n'est pas épargnée et qui ne le sera pas, parce qu'elle a été gérée sans sérieux, sans clairvoyance et sans justice non plus.
Aujourd’hui notre continent fait face à ses plus graves défis depuis la seconde guerre mondiale. Ses acquis sont menacés: sa monnaie est attaquée ; sa croissance est affaiblie ; ses solidarités sont mises à mal. Sa capacité de décider est mise en question. Un directoire Franco-Allemand s’est installé dans le « sauve qui peut » pour colmater les brèches sans cesse plus béantes, faute de disposer de ressources financière suffisantes pour vaincre la spéculation. Et c'est maintenant vers la BCE que chacun se tourne. Terrible aveu d'impuissance. Le spectre des agences de notations hante la plus part des Etats souverains jusqu’au point de mettre en cause leur souveraineté dans la composition de leur gouvernement. Bref, c’est le modèle européen qui se déconstruit sous nos yeux.
Vous êtes nés avec l’Europe, vous l’avez toujours connue. Pour vous c’est une évidence. C’était le projet de vos parents et de vos grands parents et il est aujourd’hui dans la tourmente. Les jeunes indignés se mobilisent à Athènes, à Madrid, à Lisbonne, à Londres pour dire qu’ils veulent une Europe des peuples et non une Europe des marchés. Je les comprends.
Nous sommes devant notre responsabilité. Un cycle européen s’achève, un autre doit s’ouvrir. J’aurai à proposer en votre nom une relance de l’idéal européen. La crise nous oblige à faire un choix, non pas tant sur le fédéralisme que sur son contenu. Un simple carcan budgétaire avec le risque d’un rejet par les Parlements ou par les peuples ou un nouveau projet européen portant sur les nouvelles technologies, l’enseignement supérieur, le développement durable. C’est la logique d’un premier cercle, d’une avant garde, qui n’écarte personne et nous donne la direction. Une monnaie n’est rien sans une autorité politique, sans une perspective justifiant le dépassement des frontières et des intérêts . La seule réponse face à la volatilité des marchés, c’est la force de la démocratie. Chaque génération a fait avancer l’Europe. C’est à la votre de vous battre pour lui donner un sens ou alors vous serez la première depuis l’après-guerre à vivre sa dilution.
La vérité, c’est aussi la crise qui harasse notre pays : elle a des mots.
- La désindustrialisation, 400 000 emplois industriels supprimés, 75 milliards de déficit commercial,
- La dette : plus de 1.500 milliards, 500 milliards sur le seul mandat de Nicolas Sarkozy, 75 milliards de recettes fiscales perdues. Ce fardeaux qu'il nous a infligé contraint Nicolas Sarkozy en fin de mandat à faire le contraire de ce qu’il avait engagé au début, comme si sa nature était de changer en permanence pour rester lui-même : inconstant. Mon devoir sera de la réduire pour ne pas vous en laisser la charge. Il faudra de l’intelligence pour ne pas pénaliser la croissance de demain. Il faudra du courage, il faudra de la durée. Mais les efforts à faire seront à demander à ceux qui en ont le plus. La réforme fiscale en sera l’instrument. Et si la lutte contre la fraude devra été menée avec la dernière énergie ; elle devra être dirigée vers les paradis fiscaux, les secrets bancaires, la dissimulation des revenus et des fortunes.
- Les Inégalités : avec d’un coté la diffusion de la précarité et de l’autre la protection des privilégiés. C’est ce mur là qu’il conviendra d’abattre.
La vérité c’est qu’aujourd’hui la France doute d’elle-même et de son avenir.
Alors que chaque génération avait la perspective de connaître une vie meilleure que la précédente, le mouvement s’est inversé. Les jeunes s’attendent à connaître un destin plus difficile que leurs parents : je sais la difficulté que vous rencontrez pour vous former, pour travailler, pour vous soigner, pour vous loger. Un jeune sur quatre dans notre pays vit en dessous du seuil de pauvreté, quand un moins de 25 ans sur deux dans nos quartiers populaires est au chômage, quand 150.000 jeunes sortent chaque année du système éducatif sans aucune qualification.
La mobilité sociale s’est elle même ralentie, pour ne pas dire inversée. Oui, il est plus difficile aujourd’hui à un fils d’ouvrier d’accéder à l’université ou aux grandes écoles qu’il y a trente ans.
Alors, quand la République trahit sa promesse, ce ne sont pas les jeunes qui sont défaillants, c’est la République. Et c'est pourquoi promouvoir la jeunesse c’est servir la République toute entière. C'est ce combat que je propose à tous les Français comme ce qui doit nous unir et nous permettre de nous dépasser, nous remettre en mouvement, retrouver la fierté dans notre histoire, la force dans notre présent et confiance dans notre l’avenir.
J’ai choisi de mettre la jeunesse au coeur de mon projet. Ce n’est pas pour la flatter. La jeunesse est un temps éphémère. Picasso disait qu’il fallait beaucoup d’année pour devenir jeune. Ce n’est pas par mode, ni par calcul, j’aurai d’ailleurs pris un risque. J’ai trop de respect pour tous les âges de la vie. Tous veulent la même considération et ont droit à la même dignité. Ce n’est pas non plus parce que je la crois d’un seul bloc, la jeunesse est traversée de multiples inégalités scolaires, sociales, familiales, mais parce que la jeunesse est au coeur de la cohésion sociale et nationale, parce que, au moment ou nous transmettons nos dettes, elle est notre seul capital. Sa réussite sera la notre.
J’en ai fait la grande cause de l'élection présidentielle. Je renouerai avec la promesse républicaine, avec le rêve français, celui qui permet à chaque génération de vivre mieux que la précédente. Ce sont les forces de la jeunesse qui mettent l’histoire en mouvement. Ils étaient nombreux à avoir vingt ans, parfois moins et ils ont changé le monde : les soldats français, qui sauvèrent la Révolution en 1792 au pied du Moulin de Valmy. Ils avaient vingt ans, les jeunes Parisiens qui montèrent les barricades des mouvements populaires du dix neuvième siècle, pour imposer à force d’obstination la République. Ils avaient souvent vingt ans aussi, les étudiants qui furent les premiers à organiser une manifestation dans la France occupée et aussi ces maquisards, ces résistants, qui, avec peu de moyens, au prix souvent de leur vie, ont fait tomber la barbarie nazie et ont fait naître la France du Conseil national de la Résistance, son programme social et les réalisations qui ont changé à jamais notre République.
Et en 1968, c’est l’énergie de la jeunesse encore qui permit de débloquer une société figée. Ils avaient aussi 20 ans, ceux qui se sont levés pour faire reculer les dictatures par delà la Méditerranée. Ce sont les forces de la jeunesse que j’appelle à se mobiliser, à s’organiser pour porter le changement au pouvoir en France et dans le monde dès 2012.
Notre rêve, c'est celui de la république, dont le drapeau doit être relevé... mais souvenez-vous ce que disait Jaurès. Le rêve que je vous propose ne sera, comme disait Jaurès, ni un rêve décevant ni un rêve affaiblissant :
• C’est une action à conduire
• C’est une raison à éduquer
• C’est une justice à retrouver
Votre génération rencontre plus de difficultés que la mienne. J'ai la conviction profonde que la clé du redressement de notre pays se trouve dans sa jeunesse. C'est en s'adressant à elle que nous rassemblerons tous les Français, autour d'un destin commun. Quoi de plus fort que de se réunir tous ensemble pour offrir une vie meilleure à nos enfants ?
C’est avec cette volonté que nous lutterons contre la montée de l’Extrême-droite en Europe. Le projet que je présenterai aux Français sera fondé sur trois grands engagements : redresser la France, restaurer la justice et retrouverl’espérance.
L’urgence, c’est l’insertion professionnelle. Je ne peux pas admettre le décrochage scolaire, la relégation sociale, la marginalisation. Aucun jeune de 16 à 18 ans ne doit être sans solution. C’est une nouvelle obligation qui s’imposera à la société par rapport à ses enfants. Une formation, une alternance, il y aura nécessairement réponse à chaque situation individuelle. Au delà de 18 ans, c’est la construction d’un parcours d’autonomie qui sera proposée. Tous les jeunes n’ont pas les mêmes problèmes, tous ne connaissent pas les mêmes réalités - on ne vit pas sa jeunesse de la même façon à Neuilly et dans le quartier du Neuhof à Strasbourg - mais partout on partage le sentiment que le renouvellement des générations est sans cesse repoussé.
Ce que veulent les jeunes ce n’est pas l’assistanat, mais l’autonomie. Ce parcours d’autonomie concernera les étudiants et les jeunes en formation avec de meilleures garanties contre la précarité pour les jeunes les plus en difficultés, avec les emplois d’avenir dont la durée des contrats et les modalités devront être individualisées pour en faire des instruments efficaces d’insertion à moindre coût pour la collectivité.
Aujourd’hui 1 jeune sur 4 est en emploi aidé. L’intérim et le CDD sont désormais la seule condition pour les jeunes quand ils entrent sur le marché du travail. D’ou l’idée le contrat de génération, cette belle idée qui consiste à inciter puissamment des employeurs à garder des séniors dans l’emploi et à embaucher des jeunes en CDI permettant ainsi la transmission des savoirs et des savoir-faire entre les générations dans nos entreprises. Ce dispositif n’est pas un effet d’aubaine, il ne coutera rien de plus. Ce sera une contrepartie aux 25 milliards d’exonérations de cotisations accordées aujourd'hui aux employeurs sans conditions. Rien ne sera possible sans une grande ambition éducative.
Le défi de la massification a été pour partie relevé : 66% d’une classe d’âge passe aujourd'hui avec succès le baccalauréat. Par celui de la démocratisation : sur 10 enfants de cadres qui entrent au collège, 8 seront étudiants. Sur 10 enfants d’ouvriers, 3 seulement le seront. La scolarité s’allonge, mais davantage pour les plus favorisés. Seuls 3 jeunes sur 10 d'une même classe d'âge vont jusqu'à la licence ! De plus, depuis 2007 Nicolas Sarkozy a supprimé près de 10% des effectifs de l’Education nationale (70 000). Notre taux d’encadrement dans le primaire est devenu l'un des plus faible des 37 pays de l’OCDE. La scolarisation des enfants de moins 3 ans est passés, en 10 ans, de 34% à 10%. Je considère qu'il est de notre devoir, dès 2012, de refaire de l'école une grande cause de nationale. Ce que je veux, c'est un nouveau Pacte entre la nation et son école. C'est refonder l'école de la République, pour refonder la République par l'école.
Je proposerai au Parlement une loi programme sur 5 ans, élaboré après concertation, notamment avec les syndicats, les parents d'élèves, les grandes associations.
C’est un investissement.
Les coûts de l’échec scolaire sont considérables, sur le plan personnel d’abord, mais aussi pour la collectivité. Les corrections, sont beaucoup plus chers que la prévention, ici comme ailleurs. Et c’est pourquoi il faut intervenir précocement. C’est pourquoi la régression que nous connaissons dans l’accueil des petits enfants est un désastre national. C’est pourquoi aussi il n’est pas admissible que notre école primaire soit moins dotée que partout ailleurs. Les difficultés que l’on constate en CP sont plus fortes en fin de 6ème et encore plus en fin de collège : elles ne se rattrapent pas, elles s'amplifient.
J’ai annoncé que dans ce cadre, avec des contreparties en matière de réforme du système éducatif, 12 000 postes seraient ouverts chaque année pendant 5 ans. Qui ne voit pas la nécessité de rétablir une formation des enseignants digne de ce nom, d’accueillir à nouveau les jeunes enfants dans l’école de la République, de décréter la mobilisation générale sur les zones en difficultés, là où se concentrent les échecs, les décrocheurs, les sorties sans qualification, d’assurer les remplacements qui ne le sont plus, de réfléchir à une véritable formation continue, de donner les moyens de travailler en équipes, d’assurer un meilleur suivi individualisé, de permettre un renforcement des personnels, la santé scolaire, et pour l’accueil des enfants handicapés qui doivent être accompagnés par des professionnels ?
Pour y parvenir, il faudra créer ces postes par des concours et par des redéploiement au sein de l’Etat. C’est la condition. Mon concurrent de droite me dis que ça coute cher : 500 millions d’euros pour 2,5 milliards en fin de mandat. Le même qui promet comme perspective de son prochain quinquennat, la création de 30 000 places de prisons pour 3 milliards d’investissement et 1 milliard de frais de fonctionnement !
Pourquoi ce qui serait responsable pour les prisonniers ne le serait pas pour l'école. Promettre des moyens ne sera pas suffisant. Qui le croirait ? Certainement pas moi. Elle doit permettre des réformes de fond de notre système. Elle doit être au service de ces réformes. Ces réformes concerneront les rythmes scolaires, les pédagogies, le métier d’enseignant....
J’ai demandé à Vincent Peillon, et à ceux qui l’entourent pour mener à bien cette tâche, de rencontrer d’ici le 15 décembre l’ensemble des acteurs de l’école, les syndicats des enseignants et des personnels, les parents d’élève, les grandes associations d’éducation populaire afin de préparer ce nouveau contrat
Je veux aussi que l’on parle des jeunes dont on parle trop peu, et en particulier des 1.200.000 qui sont dans l’enseignement professionnel ; elle doit être une voie d’excellence; elle doit former, créer une élite productive dont nous avons besoin pour conduire la ré-industrialisation de la France. Nous devons c’est-à-dire préparer l’avenir.
Nos dépenses pour l’enseignement supérieur et la recherche représentent 2% du PIB, alors que l’engagement de Lisbonne était d’atteindre 3% et que certains pays européens sont déjà à 3,5%.
Je fixe un objectif : 50 % de diplômés du supérieur en plus en 10 ans.
Il nous faut résoudre le problème du premier cycle universitaire en assurant mieux l’orientation, en revoyant le lien entre le secondaire et l’université, en permettant un meilleur accueil des formations technologiques. Les disparités de moyens entre classes préparatoires et grandes écoles d’un côté, et universités de l’autre est inacceptable. L’autonomie des universités est un bon principe. Mais il doit s’agir d’une autonomie réelle, avec des moyens et de la démocratie. C’est pourquoi, je proposerai également une réforme de la loi LRU. L'autonomie ne doit pas être une mise en compétition des universités, mais doit favoriser au contraire les coopérations et les réseaux entre universités, y compris avec les universités européennes et la méditerranée. Je ne peux pas admettre les limites posées à l’accueil des étudiants étrangers qui conduisent les élites de ces pays à préférer les universités américaines ou canadiennes aux nôtres.
Le progrès, c'est la transition écologique, les énergies renouvelables. La République, c’est l’Egalité, la Laïcité, la dignité humaine. Ce combat n’est pas achevé. Des libertés restent à conquérir, des conservatismes à lever, des obscurantismes à vaincre. Nous ne sommes pas seuls dans le mouvement : associations, ONG, simple citoyens, c’est notre mission de traduire les espérances en actes, les principes en lois.
Je prendrais l’initiative de saisir le Parlement d’une grande loi sur l’égalité, pour garantir celle entre les hommes et les femmes, notamment en matière de salaires, pour permettre le mariage pour tous les couples, pour lutter contre les discriminations selon la couleur de peau, l’adresse, voire la religion. Nous n’aurons pas à préciser la Laïcité comme le fait Nicolas Sarkozy pour la réduire, nous aurons à la promouvoir, partout, comme la règle essentielle de notre République, sans qu’il soit besoin ni de stigmatiser ni de fermer les yeux sur les pressions et actions violentes des intolérants sur la presse et la liberté d’opinion. La République, c’est bien plus que des droits, c’est une promesse de réussite. C’est lorsque celle-ci s’efface de l’espace public, les intégrismes s’y déploient à nouveau. Je ne l’accepterai pas.
Je vous appelle ce soir à préparer les changements qui feront le monde dans lequel vous allez vivre.
Je vous appelle à vous engager dans la campagne à mes côtés.
La force de la jeunesse, c’est d’avoir des rêves assez grands pour ne pas les perdre en chemin dans le grand mouvement de la vie.
Je veux que la France de demain redevienne une référence partagée dans le monde.
Retrouvons la confiance et l’audace. Donnons confiance à la France pour quelle retrouve l’audace d’être elle même.
Ensemble nous gagnerons.
Vive la jeunesse du monde, vivent les jeunes de France !
Vive la République et vive la France !
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