Les dirigeants conservateurs en Europe se succèdent pour apporter leur soutien au candidat UMP en France. C'est une décision logique – la droite soutient la droite –, mais c'est aussi un calcul d'intérêt : avec Sarkozy à sa tête, la France est faible et ce sont nos voisins qui donnent le ton en Europe.
1) Une France faible dans une Europe en crise
Dès 2007, l'imprévoyance financière de la majorité sortante a placé la France dans le viseur des marchés et lui a retiré sa crédibilité autour de la table du Conseil européen :
> En juin 2007, avant de faire voter la loi TEPA qui allait priver la France des marges d'action budgétaires dont elle disposait pour satisfaire des clientèles UMP, le Président sortant se rendit à Luxembourg pour demander à ses partenaires européens le report d'un an du retour à l'équilibre budgétaire en France. Alors que la crise financière n'avait pas encore éclaté, cette décision a fait planer un doute sur la solidité financièrede la France.
> En juillet 2007 – soit plus d'un an avant la chute de Lehman Brothers et le choc financier mondial –, la droite dilapida 50 Mds€ dans une la loi TEPA qui bénéficia aux trois-quarts aux plus hauts revenus (abaissement du bouclier fiscal à 50% desrevenus avec intégration de la CSG et la CRDS ; déductibilité des intérêts d'emprunts ;12 Mds€ offerts aux 10% des ménages percevant les héritages les plus élevés pouralléger leurs droits de successions).
> Une fois la crise financière déclenchée puis transformée en crise économique et sociale, les priorités d'une bonne gestion aurait dû consister à concilier sérieux budgétaire et investissement productif pour la croissance et l'emploi. Sous l'oeil critique de nos partenaires – et d'abord de l'Allemagne qui suivait cette stratégie –, N.Sarkozy multiplia les politiques clientélistes aussi hasardeuses pour l'activité que coûteuses pour le budget. Quand la priorité de la France à Bruxelles consiste à défendre la baisse de TVA dans la restauration, comment s’étonner que nos partenaires ne nous fassent plus confiance ? Quand les leçons de bonne gestion sont dispensées tout les jours sur les écrans alors que dans le même temps, l'ISF est réduit d'1,8 Mds€, comment s'offusquer ne plus être pris au sérieux ?
2) Une Président faible dans une gouvernance en crise
« La France n’est elle-même, la France n’est grande, la France n’est forte que lorsqu’elle se place au centre de gravité de l’Europe », affirmait N. Sarkozy le 2 juillet 2007 à Strasbourg. Cinq ans ont passé et ce n'est pas l'Europe qui tourne autour de la France, mais la France qui est positionnée en orbite autour des autres, et d'abord de l'Allemagne qui fixe le cap, place se shommes, impose ses vues. On comprend pourquoi Mme Merkel soutient tant M. Sarkozy :pour elle, il est un allié confortable.
> Le 7 mars 2012, la Grèce a annoncé le succès de l’opération de la restructuration de sa dette privée. Après plus de 2 ans de crise et 17 sommets de la dernière chance, cette nouvelle constitue un bol d'air pour un peuple qui retrouve, dans la douleur et peu à peu, sa souveraineté. Mais comment oublier la responsabilité du Président sortant dans les promesses déçues et le temps perdu ? Durant l'été puis l'automne 2011, c'est le président français qui, sous la pression des banques françaises, a refusé de faire participer les institutions financières à la restructuration de la dette grecque – alors même que la chancelière allemande proposait cette option.
> C'est lui qui a renoncé à un rôle direct et actif de la BCE sur les marchés souverains,alors que seule son intervention permet de calmer les tensions sur les marchés depuis trois mois.
> C'est lui qui a plié devant la droite allemande sur les euro-obligations, outil qui aurait permis de casser immédiatement la spéculation en mutualisant une partie des dettes.
> C'est lui qui a concédé à Mme Merkel la révision des Traités alors que des solutions plus simples, plus rapides et moins incertaines étaient possibles.
> C'est lui qui empêcha, avec la CDU allemande, la redéfinition des missions de la gouvernance de l'euro pour réorienter la politique monétaire qui affaiblit tant nos industries.
Résultat : le Président sortant et notre pays ont perdu sur les deux tableaux. Alors que la France a vu sa note souveraine être dégradée par les agences de notation, c'est l'Allemagne qui donne le ton et fixe le tempo en Europe. Alors que les Sommets de la dernière chance se succèdent, la crise se poursuit, les prévisions de croissance restent sombres et le chômage s'aggrave.
Cette Europe-là, embourbée dans l'austérité, c'est une Europe qui ne comporte que des perdants, aucun vainqueur, sauf ceux qui, loin d´ici, en Asie ou aux Etats-Unis, se réjouissent du déclassement de notre continent. C'est à cette Europe qui perd son rang dans la mondialisation et qui perd de vue son idéal que François Hollande et les socialistes s'opposent :
− en demandant d'ajouter la croissance et l'emploi au Traité d'austérité concocté par les droits franco-allemandes : euro-obligations pour financer les grands projets d'avenir, nouvelle politique monétaire pour un euro moins cher, taxe sur les transactions financières.
− en renouant avec l'Allemagne sur une base d'égalité et de vérité : à l'occasion des 50 ans du traité de l'Elysée, nous lui proposons des projets concrets qui seront autant d'occasions d'enrichir nos liens, par exemple sur la jeunesse, sur l'industrie, sur la politique de défense.
− en proposant à nos partenaires, dès le Sommet européen de juin 2012, de réamorcer une véritable politique industrielle à l'échelle du continent : définition des filières d'avenir pour la croissance de l'UE, mutualisation des efforts de recherche, renforcement des brevets européens, lancement de grands projets sur la base de coopération renforcés, notamment sur l'énergie, réciprocité commerciale pour protéger nos entreprises et nos savoir faire.
La droite européenne – et d'abord la droite allemande – ne soutient pas N. Sarkozy parcequ'il est de droite, mais parce qu'il est faible. Avec le candidat sortant, la France a été déclassée et sa parole a été discréditée en Europe. Avant lui, la France portait des solutions pour l'Europe. Aujourd'hui, elle est une partie du problème. Pour une France au coeur de l'Europe et une Europe au centre de la mondialisation, il faut changer de président et permettre à F. Hollande de renouer avec le dessein qui fut celui de F. Mitterrand et de J.Delors.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.