«La France [pourrait] suspendre sa participation aux accords de Schengen», a affirmé le candidat sortant le 9 mars à Villepinte, si le contrôle des flux migratoires aux frontières de l' Union européenne n'était pas renforcé. Cette proposition formulée en urgence pour mobiliser les électeurs de la droite extrême et de l'extrême droite sonne comme le symbole du quinquennat: elle résume l'incohérence d'un Président dont les gesticulations remplacent la vision.
Incohérence : l'affirmation du candidat sortant intervient quatre mois après l'adoption...du mécanisme de réintroduction des contrôles aux frontières intérieures dans des circonstances exceptionnelles coordonnée par la Commission européenne. Les négociations à Bruxelles progressent, mais avec sens des responsabilités. Le catastrophisme à visée électorale du candidat UMP en France à propos de l’espace Schengen est loin d’être partagé par tous les Etats membres: au Parlement européen, c'est l'ancien Premier ministre libéral belge qui évoque «Nicolas Le Pen»; en Allemagne, c'est le porte-parole du Gouvernement de Mme Merkel qui rappelle que «la libre circulation des personnes compte parmi les réalisations les plus concrètes et les plus importantes de l'intégration européenne et constituent une liberté fondamentale»; au Luxembourg, le Ministre des Affaires étrangères constate que «remettre en question Schengen pour plaire aux électeurs du FN, c’est anti-européen et populiste»
Incohérence encore: le 8 mars, quelques jours avant l'annonce de son candidat, le Ministre français de l’Intérieur n'a pas jugé bon de participer au premier débat politique sur la gouvernance de...Schengen.A Villepinte, Sarkozy fait des promesses sans lendemain, à Bruxelles, Guéant laisse la chaise de la France désespérément vide.Double discours aussi lorsqu'à l'occasion du Sommet des 27 du 9 juin 2011,la France a défendu l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l'espace Schengen «d'ici la fin 2012» selon le souhait du même M. Guéant. Double discours décidément quand le 15 octobre 2008, la Présidence française de l'Union européenne a proposé au Conseil européen l'adoption d'un «Pacte européen pour l'immigration et l'asile» rappelant que «l'un des fruits les plus remarquables de l'Union européenne est la constitution d'un vaste espace de libre circulation couvrant aujourd’hui la majeur partie du territoire.» Comme d'habitude avec le candidat sortant, ses gesticulations n'aboutiront à rien, sauf à abaisser la parole et le poids de la France en Europe.
Incohérence toujours: la volonté de M. Sarkozy nécessite, sous couvert d'un ultimatum au reste de l'Europe,une révision pure et simple du Traité de l'Union européenne adopté en 1997 par 26 pays alors que le même M. Sarkozy ironise dans le souhait de F. Hollande de renégocier le traité d'austérité dont l'encre est à peine sèche et qu'aucun pays n'a encore ratifié. Pour la droite, la France peut mettre tout son poids dans la balance pour cibler les étrangers aux frontières de l’Europe mais pas respecter le choix des Français sur le Traité constitutionnel européen en 2005 ou pour relancer la croissance et l'emploi pour les peuples européens aujourd'hui!
Le candidat UMP propose d'assurer seul un contrôle aux frontières actuellement coordonné avec plusieurs dizaines de pays. Avec quels policiers supplémentaires? Avec quel argent pour reconstruire les postes frontières sur les bords du Rhin, des Alpes et des Pyrénées abandonnés depuis 15 ans?Il ne répond pas.
A force de promettre comme il respire, le candidat sortant oublie qu'un président doit proposer des solutions responsables et efficaces.
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