Mes chers amis, François Cuillandre m’avait invité aujourd’hui à Brest pour que je vous présente mes vœux. Il était temps ! Alors, nous sommes le 30 janvier, et je vous dis bloavezh mat ! Mais il ne m’avait pas dit que vous étiez si nombreux, vraiment très nombreux, parce que vous êtes conscients qu’un mouvement s’est levé, qu’une espérance s’est créée, qu’une dynamique s’est engagée, que les Français veulent le changement, et que vous allez les accompagner vers cette destination, celle qui va nous conduire le 6 mai à la victoire ensemble.
Ici c’est Brest ! Et si ici c’est Brest, le changement c’est maintenant ! Je suis venu tout au long de la journée, d’abord pour, avec Jean-Yves Le Drian, visiter l’Ile Longue, c’est-à-dire là où nos sous-marins, ceux qui assurent la dissuasion nucléaire, sont entretenus. Je voulais saluer ceux qui se dévouent pour nos armées, ceux qui servent ces matériels exceptionnels, ceux qui nous permettent d’être une Nation indépendante, capable de défendre la paix sans rien craindre pour sa sécurité. Vous êtes ici dans une région où la défense nationale est présente. Vivez cette situation comme une fierté, comme un honneur, et aussi comme une responsabilité. Je veillerai à ce que la Bretagne et Brest soient toujours une région où nos armées, notre défense, soient présentes.
Mais dans ma journée, j’ai aussi rencontré les inquiétudes, les colères, et notamment les salariés de la Sobrena, qui m’ont interpellé en me disant : « nous ne croyons plus aux promesses, nous sommes dans l’inquiétude par rapport à nos emplois, nous voulons savoir, si vous devenez président de la République — ils le souhaitaient plutôt — ce que vous pourrez faire pour la réparation navale ». Mon devoir n’a pas été de leur faire de promesse — laissons cela à d’autres ! — mais de leur dire : « oui, nous avons besoin de la réparation navale ici à Brest, pour les ouvriers qui y travaillent, pour les bateaux qui s’y font réparer, et aussi pour notre industrie et pour notre construction ».
J’ai ensuite rencontré des partenaires économiques qui travaillent sur les énergies renouvelables et notamment sur l’éolienne marine. Là encore, que de perspectives qui vous sont ouvertes, que de possibilités de développement, me confirmant une nouvelle fois que la Bretagne est une terre de conquête, une terre de victoire, une terre aussi où l’on est capable d’inventer l’économie de demain !
Voilà pourquoi j’étais aujourd’hui à Brest. Mais je voulais quand même vous faire un petit signe. Je n’allais pas partir comme ça, le soir, sans vous rencontrer, ne serait-ce que pour vous dire un peu où j’en suis dans mon parcours, dans ma démarche !
C’est vrai que je suis venu souvent à Brest. Pierre s’en souvient. C’était au moment d’un congrès, il y a quinze ans. On m’avait conseillé de ne pas y venir, parce que c’était déjà chaud. Et ce fut un des plus beaux congrès, puisque je suis devenu premier Secrétaire ! Mais je ne vais pas vous raconter ma vie, ma vie d’avant. Je suis en train de prépare notre vie d’après, celle que nous allons construire ensemble, après l’élection présidentielle. Je viens devant vous comme candidat, après cette formidable consultation démocratique qu’ont été les primaires citoyennes. Trois millions sont venus, beaucoup d’entre vous, choisir celui-ci ou celle-là — plutôt celui-ci. Et donc, le voilà investi depuis le mois d’octobre. J’ai fait en sorte de parcourir la France, de rencontrer beaucoup de souffrance, de malheur, de colère mais aussi de réussite, de force et de talent.
Et puis à partir du mois de janvier, nous avons accéléré le rythme. Nous avons fait le rassemblement du Bourget, impressionnant, et j’en connais qui ont été impressionnés ! 25 000 personnes, plus de deux millions et demi ou trois millions de téléspectateurs, sans qu’on l’ait imposé sur toutes les chaînes à 20 heures 30 ! Et puis, j’ai présenté ma plateforme présidentielle avec tous les responsables Socialistes, Radicaux de gauche. Parce que quand même, rarement la Gauche et les Socialistes n’ont été aussi rassemblés qu’aujourd’hui. C’est une force, là encore, qui nous est donnée. J’en remercie tous les responsables, tous les élus, tous les militants, toutes les générations que je vois ici. La génération qui a fait la victoire de 1981, qui est là. La génération qui a fait le gouvernement de Lionel Jospin, qui est là aussi. Et la génération, la vôtre, la mienne, qui va faire la victoire maintenant, pour 2012 !
Je vous l’ai dit, un mouvement s’est créé, une force s’est levée, une espérance aussi. J’en connais la fragilité. Je sais la volatilité des modes, des humeurs, la versatilité des commentaires, des sondages. Ah, les sondages ! Personne ne les regarde, et tout le monde les scrute ! Ils font des sourires ici à ceux qui regardent ces enquêtes comme autant de pronostics ! Ils en désespèrent d’autres. Voyez leur mine ! Ne vous laissez pas impressionner, parce que rien n’est fait, rien n’est acquis, rien n’est joué. Nous sommes à trois mois des élections. Il se passera bien des événements sur le plan européen et international, et dans notre propre pays. Ne pensez pas que la Droite va nous laisser le pouvoir. Elle le devrait au regard de son bilan. Mais elle ne va pas se laisser faire, elle va combattre, elle a de puissants moyens, elle est soutenue par les maîtres de l’argent, par ceux qui contrôlent un certain nombre de médias. Et puis, elle est soutenue aussi, parce que c’est la vie démocratique, par des hommes et des femmes, des citoyens français qui veulent la Droite — que voulez-vous ! Soyons respectueux des opinions des autres. Nous n’allons pas gagner sans être dignes d’une victoire. D’ailleurs, je vous donne ce conseil : ne repoussez pas les hommes et les femmes de Droite qui pourraient venir voter pour nous, parce qu’il en faudra ! Moi, j’ai fait des comptes ! Si on ne retrouvait que ceux qui avaient voté pour Ségolène Royal la dernière fois, ce ne serait déjà pas mal. Mais cela ne suffirait pas. Il faut bien aller chercher, eh oui, celles et ceux qui ont pu voter pour Nicolas Sarkozy, qui s’en repentent, qui sont d’ailleurs les plus violents à son endroit, parce qu’il se sont sentis floués, trahis. Ne repoussez personne, rassemblez, rassemblez encore ! N’écartez aucune bonne volonté ! Parce que nous devons être nombreux si nous voulons gagner.
Alors maintenant, la Droite, après m’avoir traité de tout… Je ne vais pas ici faire le récit de toutes les épithètes dont j’ai été abondamment servi, de toutes les caricatures, de tous les dénigrements. J’ai été comparé à tout, et me voilà maintenant, je ne sais pourquoi, traité d’arrogant ! Au début, j’ai cru qu’il y avait maldonne. Mais non, ils se connaissent bien eux, et moi ils me connaissent mal, tellement mal qu’ils avaient pensé qu’un socialiste ne pourrait jamais redevenir président de la République. Et pourquoi ? Il n’y en aurait eu qu’un, François Mitterrand, dont ils n’ont plus de mot assez aimable pour sa personne, et de mots assez durs pour les grandes réformes qu’il a permises pour notre pays. Oui, quand ils parlent de François Mitterrand, c’est comme s’ils nous disaient : « voilà, quelle chance vous avez eu, la Gauche, vous avez eu un président de la République sous la Vème, le premier, le dernier, c’est terminé. » Et d’ailleurs ils nous disent : « il ne faut surtout pas recommencer ». Parce que vous vous rendez compte, ce président François Mitterrand, il avait fait voter la retraite à 60 ans, les 39 heures, la cinquième semaine de congés payés. Il avait fait la décentralisation. Il avait libéré l’audiovisuel. Il avait aboli la peine de mort. Alors, il ne faudrait pas qu’il y ait un nouveau président de la République de Gauche pour faire des nouvelles avancées ? Si.
C’est vrai qu’il ne m’a pas échappé que la Droite ne se sentait pas au mieux. Je le vois à leurs figures — même celles d’hier. Nous le connaissons bien maintenant, nous sommes devenus familiers, il s’est invité tellement de fois à la télévision ! Nous l’avons connu flamboyant, nous l’avons connu excessif, nous l’avons connu emporté, nous l’avons connu enjoué, nous l’avons connu fier de lui. Mais là ! C’est à peine s’il n’était pas dans la repentance ! Il était tout près d’avouer ses erreurs, presque à battre sa coulpe — il s’est retenu. Et en même temps, il était parti dans une espèce de fuite en avant. Parce que ce qu’il ne veut pas présenter aux Français, c’est son bilan. Et je le comprends ! Parce que dans une certaine mesure, il a vécu à crédit avec les promesses, avec les arrangements, avec les annonces. Et arrive une fin de mandat où les Français demandent des comptes. Et ils constatent que le chômage, qui devait être à 5 % de la population active — promesse du candidat élu de 2007 — est à 10 % de la population active. Que la croissance — je ne dis pas comment il devait aller la chercher — est à 0,5 % en 2012. Quand ils se rendent compte que les violences aux personnes ont augmenté de 20 %, que la dette publique a progressé de 600 milliards et de 900 milliards depuis 2002. Elle a doublé depuis 2002 ! Rendez-vous compte, en deux présidences, celle de Jacques Chirac — pour lequel j’ai toujours de l’indulgence — et celle de Nicolas Sarkozy. Ils ont réussi, avec deux présidences, à faire autant de dette publique que tous les présidents avant eux : Charles de Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterrand. Eh bien, ils ont fait autant de dette que tous ces présidents depuis le début de la Vème République. Et ils viendront nous faire la leçon et nous dire qu’ils savent gérer la France !
Alors ils évoquent la crise. La crise est là, et de ma part il serait irresponsable que de la nier. Elle est là, elle est violente, elle est lourde, elle est profonde, elle est dure. Et en même temps, ne sont-ils pas aussi responsables de cette crise ? C’est eux qui ont voulu la libéralisation des marchés ! C’est eux qui ont laissé la finance tout envahir ! C’est eux qui voulaient aussi que des produits financiers nouveaux soient créés ! Et c’est eux qui, depuis maintenant près de deux ans à la tête de l’Europe, ont réuni seize « sommets de la dernière chance ». Je crois qu’il y en a un en ce moment, qui a sans doute décidé de prolonger un peu plus la réflexion pour attendre un autre sommet ! Cela fait deux ans que la Grèce est constatée comme défaillante, et cela fait deux ans que ne lui est pas apporté le secours qui lui est espéré.
Oui, ils sont responsables de cette situation. Et en même temps, cette crise est là. Elle ne peut servir d’excuse, mais elle peut aussi nous mettre devant nos propres responsabilités demain. Je sais aussi qu’ils cherchent, par cette crise, une justification, comme si en définitive cette crise leur permettait de continuer à diriger la France alors même qu’ils n’ont rien fait pour la prévenir, pour l’empêcher, pour la réguler.
Mais pourquoi arriveraient-ils pendant les cinq ans qui viennent à faire ce qu’ils n’ont pas réussi à acter pendant les trois sans, quatre ans qui viennent de s’écouler ?
Alors je vous le dis, il n’y aura pas d’excuse, il n’y aura pas de justification. Ce ne sera pas « la faute à pas de chance » ! Il nous dira qu’il a changé, que les circonstances l’ont changé, que la crise l’a changé. Eh bien je vous le dis, ce qu’il faut ce n’est pas qu’il change, c’est changer de président de la République !
Mais hier soir, voilà qu’il était dans une fuite en avant. Pour ne pas évoquer le bilan, il annonçait des décisions qui ne pouvaient pas attendre. Rendez-vous compte, la TVA ! Ce projet existe depuis 2007. Il avait été énoncé, maladroitement, par un ministre de l’Economie et des Finances, et confirmé par le Premier ministre, celui qui est encore en place aujourd’hui. C’était l’idée d’une TVA qui devait se substituer à des cotisations sur le travail. Les élections législatives étant intervenues, le second tour ayant permis à la Gauche de gagner davantage de sièges qu’il était attendu, cette réforme a été mise de côté. La voilà qui ressort, là, à quelques semaines de l’élection présidentielle, avec l’idée que ce serait bon pour la compétitivité du pays. Mais qui peut le croire ? Qui peut croire qu’en diminuant les cotisations sociales de 12 ou 13 milliards d’euros, d’un seul coup les entreprises françaises pourraient exporter, que l’on importerait moins, et que nous aurions immédiatement des créations d’emplois dans l’industrie ? Alors même que ces baisses de cotisations vont être sur toutes les entreprises, qu’elles soient exposées à la concurrence ou qu’elles soient des entreprises de services qui ne sont en aucune façon menacées par je ne sais quelle compétition !
En fait, tout cela est une improvisation pour nous faire supporter quoi donc ? Un plan de rigueur supplémentaire. Parce qu’augmenter la TVA de 1,6 point ne changera rien à l’état de notre économie mais affaiblira encore la croissance, la consommation, et sera une mesure injuste de plus, parce que cela frappera l’ensemble des ménages. Comment l’admettre ? J’ai entendu l’explication — il fallait suivre hier ! On nous annonçait que la TVA serait décidée tout de suite, mais ne serait appliquée qu’au mois d’octobre. Allez comprendre ! Mais il nous était dit aussi que cela n’aurait aucune répercussion sur les prix, mais qu’en même temps c’était bien que soit au mois d’octobre parce que les Français allaient consommer jusqu’au mois d’octobre de peur que les prix augmentent !
Mais la meilleure façon que cela ne se produise pas au mois d’octobre, je vais vous dire : ce qu’il faut faire, c’est de voter pour le candidat qui sera celui du changement en 2012 !
Ce quinquennat – et je ne serai pas plus long – a été le quinquennat de l’incohérence. Tout a commencé par des baisses d’impôts pour les plus favorisés et se termine par des hausses de prélèvements pour tous les Français. Ce quinquennat a commencé avec le « travailler plus pour gagner plus » et se termine maintenant, avec la convention compétitivité/emploi, par le « travailler moins pour gagner moins » — et en demandant, en plus, aux partenaires sociaux d’adhérer à un tel processus ! Ce quinquennat se termine avec la taxe sur les transactions financières, mais qui remplace un impôt de bourse qui avait été supprimé il y a deux ans, par le président de la République. Allez comprendre… Mais il n’y a rien à comprendre, parce que tout cela est une suite d’inconséquences, d’improvisations, de contradictions – dont la seule logique, en définitive, est toujours de protéger les plus favorisés et de demander à tous les Français de faire l’effort.
Nous devons, pour notre part, en tirer des leçons. La première est de dire la vérité. Dans cette campagne, chacun prétendra qu’il dit la vérité. Mais il y a ceux qui ont, pendant une campagne, en 2007, fait des promesses et ne les ont pas tenues. Pourquoi seraient-ils, aujourd’hui, crédibles dans leurs annonces ? Pourquoi faudrait-il croire ceux qui ont manqué à leur parole ? Mais nous – nous parce que nous sommes la Gauche, parce que nous sommes conscients qu’une responsabilité nous attend, au mois de mai prochain –, nous devons dire aux Français ce que nous pouvons faire et promettre ce que nous pouvons tenir.
Je veux être le président qui tiendra ses engagements !
La seconde leçon, c’est que nous devons rassembler les Français. En terminer avec les divisions, les stigmatisations, les oppositions, cette façon de diriger la France qui a conduit à toujours désigner un adversaire parmi le peuple français et quelquefois, même, parmi les étrangers qui sont accueillis ici. Oui, toujours un adversaire ! Soit parce qu’il est trop jeune, soit parce qu’il est trop vieux, soit parce qu’il est fonctionnaire, soit parce qu’il est trop pauvre – et que c’est, peut-être un fraudeur. Toujours désigner, là, un ennemi pour les Français. Alors que nous, nous devons réunir, réconcilier, rassembler, rassembler les générations, rassembler les catégories, les mettre dans le même mouvement, créer une belle espérance – et quelle plus belle espérance pouvons-nous donner à tous ceux qui sont ici ou ailleurs, qui doutent, s’interrogent ou espèrent ? La seule espérance que nous pouvons lever, c’est dire que nous allons travailler pour la génération qui vient, pour la jeunesse de France, pour lui donner toutes ses chances, toutes ses capacités, toutes ses convictions pour réussir !
Et s’il nous faut trouver un adversaire, n’allons pas le chercher parmi nous. Je l’ai dit : l’adversaire, dans cette campagne, il n’a pas de nom, il n’a pas de visage, il n’a pas de parti, il ne sera pas candidat à l’élection présidentielle – il n’en sera donc pas l’élu. Et en même temps, il gouverne : cet adversaire, c’est la finance ! C’est le monde de la finance. C’est celui qui empêche l’économie d’être la plus dynamique possible. C’est la finance qui crée des inégalités, affaiblit les Etats, détruit les solidarités.
Alors, c’est un adversaire redoutable. Il ne s’agit pas de mettre en cause le système financier qui permet de prêter à l’économie, aux particuliers comme aux entreprises. Il ne s’agit pas non plus d’empêcher que, pour que l’économie fonctionne, il y ait une circulation de monnaie. Nous n’allons pas en revenir à l’économie du troc ! Et heureusement qu’il y a des banques, partout en France, pour assurer le fonctionnement même des entreprises et le mécanisme même de l’économie. Mais quand même ! Cette finance qui, finalement, a créé des produits qui n’ont plus rien à voir avec l’économie réelle. Cette finance qui, après avoir mis les Etats dans la situation d’aider les banques, vient maintenant menacer les Etats parce qu’il y a des dettes souveraines qui peuvent être autant de produits de spéculation. La finance qui, maintenant, déstabilise des gouvernements. Les remplace, même ! Et, dans certains pays, dicte ce qu’il convient de faire.
Nous devons reprendre l’initiative ! Mettre la finance au service de l’économie ! Ce sera une tâche difficile, âpre. Nous commencerons, en France, parce que c’est notre responsabilité. Nous ferons une réforme bancaire qui séparera les activités de prêt et de crédit à partir de dépôts pour que l’économie puisse être véritablement au service des Français. Et puis, il y aura l’autre activité, plus spéculative – et c’est une partie de la fonction de la finance – qui devra, finalement, utiliser l’argent de la finance, mais pas l’argent des épargnants, des déposants qui n’ont rien à voir avec ces produits et avec ces placements.
Nous devrons aussi interdire un certain nombre de produits, de produits toxiques qui ont pris une indépendance par rapport à l’économie réelle. Mais disant cela, je n’invente rien de révolutionnaire. C’est Barack Obama qui, lui-même, s’adressant au Congrès des Etats-Unis, dénonçait la finance, les produits toxiques et considérait qu’il y avait tellement de richesses aux Etats-Unis que, quand même, les riches devaient payer au moins autant d’impôts que les plus modestes ! Nous sommes, Etats-Unis et Europe, confrontés aux mêmes défis. Et donc nous mettrons bon ordre, y compris dans les rémunérations des traders, des dirigeants, de ceux qui s’enrichissent en dormant pendant que d’autres s’appauvrissent en travaillant !
Je ne fais pas cela par facilité, mais parce que je considère que c’est aujourd’hui une nécessité d’avoir cette régulation de la finance, ce dépassement par rapport aux contraintes. Mais nous avons besoin de l’Europe. Sans l’Europe, nous ne pouvons pas agir avec la force nécessaire. Mais l’Europe, aujourd’hui, avec les dirigeants qui la conduisent, considère que seules les disciplines peuvent nous mettre à l’abri de la finance. Des disciplines, il en faut. Des règles sont nécessaires. Des sanctions par rapport à des gouvernements ou à des Etats qui n’ont pas géré leurs finances publiques comme il convenait peuvent être comprises. Mais nous ne parviendrons pas à réduire la dette, à maîtriser les déficits s’il n’y a pas la croissance. Et ce que j’attends de l’Europe, c’est qu’au-delà de ces disciplines, au-delà de ces règles en commun, au-delà de la défense de la zone euro nécessaire, il nous faut de la croissance. Et quand je dis cela, on me dit : mais, quand même, comment allez vous faire pour convaincre la Chancelière d’Allemagne ? Elle est élue par les Allemands. Nous ne pouvons pas décider à sa place. Nous sommes conscients qu’elle défend aussi ses propres intérêts. Mais nous pouvons quand même la convaincre, la convaincre que ce n’est pas l’Allemagne qui pourra se sauver seule si tous les autres sont contraints, punis, asséchés, appauvris par des plans d’austérité ou de rigueur.
L’autre soir, je débattais avec Alain Juppé – un moment… intéressant ! Il me dit : mais comment allez vous faire, nous n’y sommes pas parvenus ? Eh bien justement ! Comment allons-nous faire ? Parce que le peuple français va se prononcer, le 6 mai prochain. Et s’il nous donne mandat, nous serons forts. Je ne dis pas qu’avec le seul appui, le seul soutien du suffrage universel, nous pouvons tout bousculer. Mais, quand même : quand un président vient d’être élu par un grand pays comme la France et qu’il s’assoit à la table des négociations, il a une légitimité, il a une parole, il a une autorité. Cela n’empêche pas qu’il y ait des discussions, des négociations. Mais je suis convaincu, si nous sommes suffisamment nombreux à donner la victoire au mois de mai, je suis convaincu que nous arriverons — parce que c’est la règle en démocratie – à faire avancer nos idées, avancer nos solutions. Parce que, je vous l’annonce aussi, une partie des Allemands attend notre victoire ! Une partie des Italiens attend notre victoire ! L’Europe attend notre victoire ! Parce que l’Europe veut avancer. Parce que nous sommes européens !
J’ai voulu l’Europe ! J’ai voulu l’euro ! Mais parce que j’ai voulu, comme vous tous, que cette Europe soit solidaire, soit une Europe dynamique, soit une Europe de croissance, soit une Europe qui invente – qui invente de nouveaux projets, qui soit capable de donner des nouvelles perspectives industrielles, écologiques, pour nous permettre d’être plus forts, ensemble. C’est une grande aventure, l’Europe ! Nous n’allons pas simplement en faire un carcan, une discipline, un enfermement, une punition. Parce qu’à un moment, si nous sommes simplement dans une Europe qui empêche, qui entrave, eh bien les peuples s’en détourneront. Et la menace, c’est que les populistes, les extrémistes – il y en a, ici, en France – utilisent justement la défiance à l’égard de l’Europe pour atteindre à cette grande idée, cette belle idée de la solidarité sur le Continent, de la paix, de la volonté de vivre ensemble, d’échanger et de porter des valeurs et des principes !
Le projet que je porte, c’est celui du redressement dans la justice. Il nous faut nous redresser. La France a perdu depuis cinq ans, dix ans, tant d’atouts : perte d’emplois industriels, perte de notre compétitivité, des déficits qui se sont accélérés, aggravés. Et puis, ce doute qui s’est installé dans notre pays, où nous doutons de nous-mêmes, de notre avenir, de nos forces. Où nous pensons que, finalement, nous serions une grande nation mais en déclin. Eh bien non ! Nous sommes la France ! Un grand pays qui a surmonté bien des épreuves. Nous avons une grande histoire. Nous avons vécu des crises, vécu des révolutions, vécu des conflits. Et chaque fois, il s’en est trouvé – des hommes et des femmes, valeureux, des citoyens anonymes – qui se sont mobilisés, qui se sont surpassés, qui se sont dépassés ! Et puis des dirigeants clairvoyants qui les ont emmenés !
Eh bien, aujourd’hui, nous sommes devant le même défi ! Et c’est le peuple français qui a la réponse. La France n’est pas un problème dans la crise. La France est une solution ! La France n’a pas à être « moins la France ». Elle doit être plus elle-même, avec ses valeurs, avec ses principes, avec ses capacités. Nous sommes un pays jeune qui, aussi, vieillit bien. Nous avons une génération qui attend, qui espère. Nous avons la vitalité démographique la plus forte d’Europe. Nous avons des entreprises dynamiques. Nous avons aussi plein de talents, de créateurs, d’artistes. Nous sommes la France ! Et nous ne pouvons pas – j’ai beaucoup de respect pour l’Allemagne et je pense que nous avons bien des choses à faire ensemble, Allemands, Français –, nous ne pouvons pas simplement dire aux Français : vous allez vivre comme les Allemands, vous devez faire comme les Allemands ! Comme on ne peut pas, en Allemagne, dire : vous allez vivre comme les Français. Nos deux peuples doivent se rejoindre dans des projets communs, doivent parler, échanger leur langue, leur culture, avoir des projets industriels à bâtir. Mais nous n’avons pas besoin de nous aligner l’un l’autre. Nous méritons mieux, chacune de nos Nations ! En revanche, France et Allemagne, nous avons à conduire l’Europe. A la mobiliser. A la rassembler et à faire en sorte qu’elle avance et qu’elle ne craigne rien pour son avenir.
Nous sommes la première puissance économique du monde, nous l’Europe. Le dit-on suffisamment ? Les Etats-Unis sont beaucoup plus endettés de nous. Quant à la Chine, l’Inde, le Brésil : grands pays émergents, sûrement, mais qui sont dans une logique de rattrapage. C’est chez nous, ici, que nous pouvons porter des valeurs, des principes, et avoir une parole forte à l’égard du monde – faut-il encore la prononcer. L’Europe doit exister, aussi, politiquement.
Donc, le redressement : il faut d’abord le commencer ici, en France. Redressement industriel. Je vois que le président sortant nous prend quelques idées. Nous ne sommes pas, finalement, si mauvais ! La banque publique d’investissement : je ne suis pas sûr que nous parlions de la même chose… Mais enfin, oui, il faut une banque publique d’investissement pour qu’elle puisse accompagner un certain nombre de projets, de PME, d’entreprises innovantes. Mais cette banque publique d’investissement travaillera avec les conseils régionaux, avec les fonds régionaux. Elle devra être elle-même décentralisée, parce qu’il faut que nos territoires vivent. Un des atouts de notre pays, ce sont les territoires ! Et la Bretagne en est le meilleur exemple. Il faut libérer les territoires, libérer leur énergie, leur donner des compétences, leur donner des moyens financiers et le droit de lever l’impôt davantage qu’aujourd’hui.
Nous avons aussi un redressement à faire sur le plan de l’épargne, qu’il faut mobiliser et orienter vers l’industrie. Nous avons besoin de petites et moyennes entreprises qui soient davantage accompagnées. Nous avons aussi une fiscalité à revoir. Il n’est pas normal que les grandes entreprises paient moins d’impôt sur les sociétés, en proportion, que les petites et les moyennes ! C’est pourquoi je propose qu’il y ait, en définitive, un taux pour les petites entreprises (15 %), un taux pour les moyennes (30 %) et un taux plus élevé pour les grandes (35 %) : parce qu’il faut, là aussi, que les petites et les moyennes entreprises soient encouragées.
Et quand je parle de redressement, je parle de toutes les forces productives, y compris l’agriculture. Parlons de l’agriculture. Là aussi, c’est une excellence française, à condition que ce soit dans la diversité des agricultures. Il n’y a pas qu’un seul modèle d’agriculture. Et puis, nous devons avoir toutes les forces d’agricultures, et des agricultures de qualité, de proximité, qui ne sont pas forcément des agricultures de forte concentration. Nous avons besoin de tous les agriculteurs. Parce qu’ils sont aussi une force au service de notre pays.
Et puis, ce redressement, nous devons le faire aussi dans nos comptes publics. Ah, oui ! Parce que les déficits, ils ne vont pas disparaître avec le Président sortant. Ce serait très simple, s’il partait non pas avec la caisse – elle est vide ! – mais s’il partait avec les déficits et les dettes. Eh bien, non : les déficits et les dettes, nous aurons à les assumer. C’est cela, la continuité de l’Etat. C’est cela, aussi, l’honneur, à un moment, de servir le pays. Parce que parfois, quand je parle à un certain nombre de nos compatriotes, ils me disent : ah, vous avez bien du courage, vous – je parle du vrai courage, pas celui de faire augmenter les impôts pour les plus modestes ! – vous avez du courage de venir au pouvoir – on n’y est pas ! – mais quand même, avec toute cette situation, avec toutes ces dettes, avec tous ces déficits, finalement, est-ce que vous ne prenez pas trop de risques ?
Il y a une partie de la Gauche, d’ailleurs qui, quelquefois, se fait cette réflexion. Elle préfère être dans la résistance ou dans la révolution, plutôt que dans la responsabilité. Eh bien non : nous, notre honneur, notre devoir, c’est de prendre les décisions qu’attend le pays ! Il faudra le faire. On ne peut pas laisser une dette à nos propres enfants ! On ne peut pas, avec les déficits, se mettre dans les mains des marchés. Parce que la souveraineté est, finalement, modifiée, altérée, dès lors que les marchés vous impriment leurs propres normes et leurs propres exigences.
Donc nous aurons à redresser notre pays, son industrie, ses forces productives et ses comptes publics. Mais nous le ferons avec la justice ! La justice, cela commencera avec la justice fiscale, avec la réforme fiscale que le pays attend. C’est-à-dire commencer à faire que les revenus du travail et les revenus du capital soient imposés au même barème et avec les mêmes taux de progressivité. La justice fiscale, ce sera aussi d’avoir un taux supérieur de 45 % sur des revenus de plus de 150 000 euros. Et j’ai entendu la Droite me dire : mais, il s’en prend aux classes moyennes ! Je ne sais pas s’ils connaissent bien les revenus des classes moyennes dans notre pays… Mais, même sur le quotient familial, il est normal que chacun, chacune, dès lors qu’il a un enfant, puisse bénéficier d’un avantage fiscal. Mais est-il juste que ceux qui ne sont pas imposés à l’impôt sur le revenu n’aient aucun droit à un avantage fiscal ? C’est pourquoi, en même temps que nous abaisserons légèrement le plafond, nous accorderons un supplément de 25 % à l’allocation de rentrée scolaire, pour que tous les enfants de notre pays soient aidés de la même façon.
La justice fiscale, c’est aussi revenir sur les allégements d’impôt sur la fortune. C’est aussi revenir sur les allégements des grosses successions. J’entendais, là aussi, le président sortant dire : on a protégé les petites successions. Mais 75 % des successions sont exonérées d’impôt. Donc ce sont les grosses successions qui ont été, en définitive, favorisées. Tout a été dans le même sens ! Et là, quand j’entends qu’il faudrait même augmenter les coefficients d’occupation des sols : mais pour qui ? Pour ceux qui ont déjà le droit de construire ? Pour ceux qui ont déjà les terrains, et qui vont encore avoir une plus-value, un avantage ? Pour ceux qui ont déjà les immeubles, les maisons ? Il faudrait leur donner, en plus, des droits de construire gratuitement ? Moi, je préfère que l’Etat montre l’exemple et que tous les terrains qu’il possède soient mis à disposition des collectivités locales, pour que ces collectivités créent des logements sociaux, créent de nouveaux logements, partout.
Oui, nous avons besoin de justice, d’égalité. Parce que l’égalité, c’est l’âme de la République ! Notre Nation s’est toujours battue pour l’égalité, depuis la Révolution française jusqu’à la IIIème République où il a fallu voter l’impôt sur le revenu – ça n’a pas été simple. Et il a fallu, à chaque fois, se battre. Chaque fois, c’est la Gauche qui a mené ces réformes. Et, encore aujourd’hui, c’est à la Gauche de faire que l’impôt soit juste et que chacun participe à l’effort collectif – en fonction de ses revenus et de ses patrimoines. Ce n’est pas, là, stigmatiser les plus fortunés. Moi, j’ai beaucoup de considération pour les plus fortunés, à condition qu’ils viennent payer leurs impôts en France. Parce, que quand, même, quel patriotisme que de s’exiler, que d’aller loin quand on a fait fortune grâce au travail, au sien mais aussi à ceux qui vous l’ont permis ! Quel plus bel honneur que de pouvoir participer aussi à la solidarité ? Et d’ailleurs, j’ai le sentiment que, maintenant, un certain nombre de ces plus fortunés prennent conscience. Aux Etats-Unis surtout. En Allemagne, parfois. J’entendais le président du SPD qui parlait de patriotisme. Eh bien, oui, il y a du patriotisme, aussi, à participer à l’effort en fonction de ses revenus et de son patrimoine !
Donc voilà, la justice. Mais la justice est aussi sociale. Ah, ce sera difficile de répartir ce que nous n’avons pas créé. Et je ne vais pas, là non plus, annoncer des redistributions, des augmentations de salaires. Comment le pourrait-on ? Mais, en revanche, il y a des droits qui doivent être rétablis. Que ceux qui ont cotisé 41 années et qui ont travaillé tôt puissent partir à la retraite à 60 ans. Ce n’est quand même pas un privilège ! Et en matière de santé, quand je vois que des familles, que des jeunes et parfois des personnes âgées ne peuvent plus accéder aux soins parce que c’est trop loin, parce que c’est trop cher et qu’il y a des dépassements d’honoraires, et qu’il n’y a plus de médecins dans un certain nombre de territoires, où est le droit à la sécurité sociale ? Le droit à la santé ? Et donc il faudra aussi, en même temps que l’hôpital sera reconnu comme un service public, ce qu’il n’est plus, Il nous faudra avoir une médecine de ville qui est prête, qui sera rémunéré en partie pour sa présence sur le territoire, pour la prévention et pour le lien avec l’hôpital.
Justice, justice territoriale. Est-il acceptable qu’un certain nombre de nos villes, de nos quartiers, n’aient pas les dotations qui sont attendues parce qu’elles sont trop pauvres – et que des populations soient reléguées et abandonnées ? Alors que des villes riches ne font même pas l’effort de faire des logements sociaux, en dépit de la loi ? Eh bien, nous ferons en sorte que les communes qui ne respectent pas les obligations en matière de logements sociaux soient sanctionnées cinq fois plus qu’aujourd’hui !
Et la justice, c’est aussi le droit à la sécurité. Il n’est pas, là aussi, acceptable que ce soit justement dans les quartiers qui ont le plus de délinquance qu’il y ait le moins de présence de forces de police ou de gendarmerie. Que dans certains quartiers, les trafics, les bandes se soient installées en toute impunité, parce qu’il y a eu des diminutions d’effectifs de gendarmerie et de police depuis cinq ans. Allez comprendre là aussi : quand Nicolas Sarkozy était ministre de l’Intérieur, il a créé 10 000 postes de gendarmes et de policiers. Et depuis qu’il est président de la République, il a supprimé 10 000 postes de gendarmes et de policiers ! Allez comprendre ! Et pendant ce temps-là, ce sont les plus modestes, ce sont les plus âgés, parfois aussi les plus jeunes qui sont menacés. Donc, nous aurons une Police, une Gendarmerie présentes dans les quartiers où c’est nécessaire. Mais nous aurons aussi une action de prévention, parce que nous ne pouvons pas accepter que ce soit là encore la déscolarisation et la rue qui servent de guides à des jeunes perdus.
Et c’est la raison pour laquelle, et j’y reviens, la grande priorité, la grande cause du quinquennat que nous allons préparer ensemble, c’est la jeunesse. C’est le droit à cette jeunesse de réussir. Je ferai de l’Education nationale la priorité budgétaire. La réforme se fera. Bien sûr, il en faudra, des réformes : sur les rythmes scolaires, sur l’accompagnement scolaire, sur le travail en équipe. Les enseignants y sont prêts – il faudra négocier. Et en même temps, il nous faudra créer des postes dans l’Education nationale. Parce que quand 80 000 postes ont été supprimés sur ce quinquennat, et quand j’en annonce 60 000 pour le quinquennat qui vient, on me parle d’économies budgétaires. Mais combien a coûté la baisse de la TVA sur la restauration ? 3 milliards. Comment coûteront les postes de l’Education nationale : 2,5 milliards à la fin de 2007. Combien a coûté le plan sur les prisons (30 000 places de plus) ? 3 milliards. Combien coûte le plan pour la création de postes ? 2,5 milliards. Alors, qu’est-ce qu’on veut ? Que choisit-on ? Quelle est la priorité ? Ne vous laissez pas impressionner ! La Droite augmente la dépense, et la dépense pour certains, la dépense fiscale, les avantages, la dépense parfois inutile. Et nous, nous devons faire en sorte que la dépense soit un investissement. Et investir, c’est choisir l’éducation, la formation, la qualification.
150 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme, sans qualification, sans formation. Eh bien moi, je porte l’objectif de diminuer de moitié ce taux d’échec. On me dira : « mais c’est encore trop peu ». Si déjà nous faisions en sorte qu’il y en ait la moitié qui s’en sorte, ce serait un progrès. Mais on s’occupera aussi des autres. C’est la raison pour laquelle aucun jeune de 16 à 18 ans ne restera sans solution, soit en formation, soit en apprentissage, soit en service civique. Et je ne vais pas non plus dire que l’avenir serait de faire de tous les jeunes des apprentis. Parce que quand même, l’Education nationale, elle est là. L’université est là aussi pour accueillir des jeunes, y compris en alternance.
Il faudra aussi accompagner l’autonomie de ces jeunes, leur permettre de faire des insertions qui soient compensées par une allocation. Allocation d’étude aussi pour les étudiants, sous conditions de ressources. Et puis, il y aura le contrat de génération, cette belle idée qui consiste à permettre à un senior de rester dans l’entreprise le temps qu’il puisse partir à la retraite, et de permettre à un jeune de rentrer enfin avec un contrat à durée indéterminée. Quatre jeunes sur cinq sont en contrat à durée déterminée ou en intérim. Eh bien, l’employeur qui embauchera un jeune avec un contrat à durée indéterminée, qui gardera les seniors pour qu’ils puissent partir à la retraite le moment venu à taux plein — senior transmettant son expérience aux jeunes — cet employeur-là ne payera plus de cotisations sociales sur les deux emplois. Voilà ce que je veux faire pour les jeunes.
Le changement, il faut en convaincre nos compatriotes, le changement, il est espéré, il est voulu. Mais en même temps, beaucoup s’interrogent sur la démocratie, sur la politique, sur sa capacité à pouvoir modifier le destin de chacun. Je sais bien ces doutes et ces colères qui taraudent une grande partie de nos concitoyens. Je vous préviens sur l’extrême droite. Elle est là, partout, à un niveau que nous n’avions jamais connu, même le 21 avril 2002. Elle fait semblant d’avoir changé : c’est la même. Même nom, mêmes idées, mêmes mauvaises pensées, même rendez-vous avec l’extrême droite européenne. Elle était il y a quelques jours en Autriche avec ce que l’Europe compte de pire en matière d’extrême droite. Et quand je vois des jeunes, oui des jeunes, quand je vois des ouvriers, quand je vois des exclus de la société aller vers l’extrême droite, mais ne laissez pas faire ! Ne laissez pas les ouvriers voter pour un parti qui dessert leur intérêt ! Ne laissez pas des jeunes faire un vote qui est finalement le retour au pire du passé de notre Histoire ! Ne laissez aucun homme, aucune femme, même désespérés, faire ce choix qui, à un moment, l’exclura davantage !
Nous sommes conscients de ce risque. Rien n’est fait, je vous l’ai dit, y compris pour le premier tour. Et si j’ai un avertissement à vous lancer, c’est qu’il va falloir assurer d’abord le premier tour si vous voulez gagner au second tour. Ecartez le risque de la dispersion, le risque de l’avertissement, du vote de colère, de tous ceux qui disent : « je vous retrouverai au second tour ». Mais au second tour, je ne serai peut-être plus là ! Je connais maintenant la dynamique d’une élection. J’ai vécu le 21 avril 2002, j’y étais, ce soir-là, quand j’ai vu Lionel Jospin annoncer son retrait de la vie politique et que j’étais, premier Secrétaire, obligé d’appeler à voter pour notre adversaire dans la République, pour éviter l’ennemi de la République. J’ai fait cela. Je ne veux plus jamais avoir à vivre une situation comme celle-là !
Et je ne vous dis pas ça pour réduire l’influence des autres candidats de Gauche. Il faut que l’électorat écologiste se reconnaisse, ainsi que l’électorat communiste, Front de Gauche, et également son candidat, il existe, je l’entends. Mais en même temps, c’est pour quoi faire, finalement, ces candidatures ? Si c’est pour témoigner, elles en ont le droit. Si c’est pour gagner, alors il aurait peut-être fallu se rassembler dès le premier tour tous ensemble ! Rendez-vous compte de la force que nous aurions eue, de ce mouvement que nous aurions créé. Et en même temps, nous avons besoin de toute la Gauche. Alors, évitons d’aller se disperser sur des candidats dont on ne connaît même pas, finalement, l’identité politique, ceux qui vous disent qu’ils ne sont ni de Droite ni de Gauche et qui ne savent même pas ce qu’ils vont faire au soir du premier tour. Mais je sais ce qu’ils vont faire : toujours la même chose.
Si on veut que la Gauche gagne, j’ai un conseil à vous donner : votez pour un candidat de Gauche, c’est plus simple, c’est plus clair, c’est plus rapide !
Chers amis, quand je reviendrai à Brest, je vous reparlerai. Si je viens avant le mois de mai, vous serez encore plus nombreux. Si je viens après le mois de mai, tout dépendra de vous. François m’a invité à la fête maritime. C’est, généralement, le 14 juillet. C’est mieux qu’une garden party ! Mais faut-il encore que notre bateau soit arrivé au port. Alors, soufflez fort ! Mettez grand vent, ne craignez rien ! Et en même temps, je vous ai avertis, ce sera dur, ce sera rude, il nous faudra combattre avec respect. Pas besoin de caricaturer, pas besoin de stigmatiser. Laissez-les tranquilles. Ne les regardez plus, enfin, si vous le pouvez. Ignorez-les. Je le dis à mes amis : « ne répondez plus ». Ne vous occupez que des Français, seuls eux comptent, seuls eux doivent être convaincus, seuls eux doivent être mobilisés. Parce que, ce que nous voulons les uns et les autres, ce n’est pas seulement faire gagner notre candidat, faire gagner la Gauche, bien sûr ; mais ce que nous voulons c’est faire gagner la France, parce que nous portons une idée qui est plus grande que nous, parce que nous avons une cause qui nous dépasse, parce que nous voulons, nous la Gauche, servir notre pays, et qu’il est aujourd’hui dans l’attente d’une espérance nouvelle. Il sait que ce sera difficile. Il est lucide, et en même temps, il veut qu’il y ait de nouveau un changement, un mouvement, une écoute, une considération, une fierté.
J’ai compris ce qu’était le message des Français : ils veulent d’abord être respectés, être regardés comme dignes, chacun d’entre nous, ici. Ils veulent qu’on leur dise : « vous êtes ici, homme, femme, jeune ou moins jeune, un atout pour la France ». Nous avons besoin de tous, parce que nous voulons que notre pays soit plus beau, soit plus fier, soit plus grand. Parce que nous sommes la France, parce que ce qui nous emmène, c’est une cause qui est bien plus grande que nous, bien plus grande que notre territoire, c’est la cause de la liberté, c’est la cause de la République, c’est la cause des valeurs. Le peuple peut être considéré parce qu’il est un grand peuple. Il faut lui dire : « vous méritez mieux, redressez la tête, vous êtes quand même des citoyens français » ! Et quand j’en vois, dans les quartiers qui me disent : « je suis citoyen français mais je ne suis pas vraiment français », je leur dis « mais être français c’est le plus beau nom qui puisse être donné à un citoyen du monde ». Eh bien moi, je veux qui chacun et chacune, ici, soit fier, soir fier d’appartenir à notre pays, fier d’être digne de réussir. Je veux que les jeunes puissent être dans une démarche qui leur donne confiance et espérance.
Voilà, mes amis, ce que j’étais venu vous dire à Brest. Je sais la vitalité, la force de la Bretagne. Je sais que vous avez, avec la Gauche, conquis bien des places qui paraissaient imprenables où la Droite était installée depuis toujours, avec les mêmes familles. Et puis vous avez été capables, vous, de vous donner les élus qui sont ici et qui travaillent pour le bien commun. Eh bien, je suis sûr que la Bretagne va être au rendez-vous de l’Histoire le 6 mai, que vous allez être, peut-être, avec le Limousin ma région, être la région qui va donner le plus de voix à la Gauche. Je vous fais confiance ! Travaillez, ne ménagez pas votre peine, mobilisez-vous, donnez confiance, et nous allons faire que le 6 mai soit effectivement une aussi belle victoire que le 10 mai 1981 !
Je veux que votre génération, celle qui n’a pas connu la victoire de la Gauche, puisse avoir la joie, l’enthousiasme et la reconnaissance d’une belle victoire pour la France.
Merci mes amis, à bientôt, le 6 mai !
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