Mes chers amis, c'est un grand plaisir de vous retrouver ce soir - nombreux, très nombreux - dans cette salle et au-delà, de vous retrouver ici, à Rouen, en Seine-Maritime, dans cette Normandie où je suis né et où j'ai grandi. Bien des souvenirs m'y ramènent : Les rues de la ville de Rouen – je remercie Valérie Fourneyron de m'y avoir accompagné –, Bois-Guillaume lorsqu'on y trouvait encore des terrains agricoles, le stade Robert-Diochon quand le FCR était en première division, Wassel quand il y avait encore un régiment du génie et la gare de Rouen où, régulièrement, j'arrivais de Paris et d'où j'y repartais. Je constate que, trente ans après, on met le même temps pour faire le trajet et cela m'amène forcément à prendre un engagement devant vous pour une modernisation, la plus rapide possible, de cette ligne.
Ce soir, chers Normands, recevez le salut chaleureux de l'un des vôtres, un exilé qui est devenu corrézien. Corrézien, Normand : il faut croire au métissage, au mélange et aujourd'hui, je suis - devant vous - très fier, après les primaires citoyennes, d'être votre candidat à l'élection présidentielle. Avec un devoir, une responsabilité, une charge : permettre à la France de changer de président, de changer de politique, de changer de majorité, de changer d'avenir. Je n'y réussirai pas seul. J'ai besoin de vous tous – vous êtes là ! - et j'ai aussi besoin des élus de votre territoire.
Je remercie Laurent Fabius de ses paroles amicales. Nous partageons l'esprit d'unité et le devoir de victoire. Je mesure chaque jour sa contribution à ma campagne et le travail qu'il a mené pour préparer la première année de l'alternance, là où tout se décide. Encore faut-il parvenir à être élu pour avoir une première année... Mais nous nous y préparons déjà. J'en connais qui ne préparent que le dernier mois, je préfère préparer la première année ! J'ai aussi chargé Laurent de me représenter dans les régions du monde qui seront décisives pour notre diplomatie. J'ai donc besoin de lui et j'en aurai davantage besoin après l'élection présidentielle.
J'ai aussi besoin aussi de vos élus sans lesquels rien ne sera possible dans cette campagne. C'est eux qui donneront la ligne à beaucoup d'entre nous. J'ai besoin des militants, des sympathisants, bref de tous ceux qui veulent la victoire. Et ils sont nombreux, au-delà de cette salle.
Je connais les atouts de la Haute-Normandie, l'excellence de sa production industrielle - l'énergie, la chimie, l'automobile -, les ports qui sont aujourd'hui votre fierté, le savoir-faire des ouvriers, la qualité de l'agriculture, le haut niveau de la recherche et de l'université. Mais je n'ignore rien de la crise. Elle frappe ici comme ailleurs, et ici durement. J'étais, il y a quelques semaines, à Petit-Couronne pour Petroplus : c'est l'avenir du raffinage qui se joue là, au-delà même de cette entreprise. J'étais cet après-midi à M-real, dans l'Eure, et j'ai vu des ouvriers se battre pour que leur société vive, là où des investissements considérables ont été faits et où il y a un potentiel pour votre région et pour le pays. Cette usine ne doit pas fermer !
La Seine-Maritime et l'Eure ne sont pas les seuls territoires à subir de plein fouet ces drames. Rendez-vous compte, un millier d'entreprises ont fermé depuis trois ans, 750 000 emplois industriels ont disparu depuis dix ans. Je n'ai jamais été de ceux qui ont annoncé, ou anticipé une France sans usine, parce que je sais qu'il n'y a pas de redistribution sans production, pas d'économie sans industrie, pas de recherche sans fabrication, pas d'indépendance sans un commerce extérieur équilibré. Les pays qui résistent le mieux à la crise ont préservé une base productive industrielle. Ils ont encouragé l'esprit d'entreprise, misé sur l'innovation technologique, sociale, environnementale. Ils ont investi massivement dans la formation, dans l'éducation. Ces pays ont aussi facilité le financement de leur économie, conjugué des atouts industriels avec des infrastructures. Alors, ce que ces pays ont fait, nous ne serions pas capables de le faire ?... Si, nous le ferons, après l'élection présidentielle !
Depuis dix ans, ceux qui exercent les responsabilités dans notre pays ont abandonné toute ambition industrielle pour y substituer une approche à courte vue, des aides aux entreprises sans aucune contrepartie, des annonces fracassantes sans lendemain, désespérant les ouvriers, décrédibilisant la parole publique. Ai-je besoin de donner des exemples ?... Et voilà que depuis quelques semaines, des sauvetages de circonstance sont entrepris. On appelle à la rescousse des patrons amis. Tant mieux si cela permet de sauver des emplois ! Mais, tout de même, est-ce logique ? Est-ce là une réflexion durable ? Est-ce là une vision ? Est-ce là une ambition ? Non, tout simplement un calcul!
J'ai inscrit le redressement productif au cœur du projet que je propose aux Français, avec des idées nouvelles.
D'abord, la banque publique d'investissement pour soutenir les filières d'avenir, accompagner les PME, pour rapprocher tous les outils du financement, qui existent, mais dans le morcellement et, parfois même, dans la compétition. Ces moyens permettront de constituer des filières d'excellence en matière de santé, de mobilité durable, de construction, de numérique et en matière énergétique. Cette banque publique d'investissement, je vois déjà qu'on la copie. Nous donnons déjà de l'inspiration à ceux qui sont au pouvoir depuis dix ans - heureusement qu'il y a des campagnes électorales ! Cette banque publique se déclinera à travers des fonds régionaux, parce que c'est au plus près des entreprises, au plus près des créateurs, que nous pourrons unir les efforts et être performants.
Oui, je changerai la fiscalité. Elle sera plus favorable aux PME qu'aux multinationales. Nous ferons un taux bas pour les petites entreprises - 15 % -, un taux moyen pour les petites et moyennes entreprises - 30 % - et 35 % pour les plus grandes. Et nous ferons une différence selon que le bénéfice est distribué aux actionnaires - l'impôt sera alors plus fort - ou réinvesti dans l'entreprise - l'impôt sera alors plus bas.
La France est un pays d'épargne. Tant mieux! Mais cette épargne doit être réorientée vers l'investissement, vers l'emploi plutôt que vers la rente. C'est le sens du livret d'épargne industrie que j'ai proposé et que nous mettrons en place au lendemain des élections. Le produit de ce livret d'épargne sera affecté au financement des PME et à l'innovation, pour que les entreprises grandissent, embauchent, innovent, exportent.
Oui, nous avons besoin des entreprises, des artisans, des commerçants ! Dans chaque région, il y aura un interlocuteur unique pour faciliter leurs démarches, réduire les délais d'instruction des dossiers, permettre un meilleur accès à la commande publique.
Nous avons besoin de créer, de produire, de fabriquer ici, de localiser nos activités ici, pour être meilleurs dans le monde. Nous soutiendrons les nouvelles économies numériques, écologiques, parce que nous avons besoin d'être en avance par rapport à nos concurrents. Voilà une stratégie, une ambition qui permettra à notre pays de faire de nouveau la course en tête dans la mondialisation et de ne pas être obligé de courber l'échine, demander pardon, s'aligner et ne pas peser comme il le devrait sur la scène européenne et sur la scène mondiale. Là, se situe la compétitivité, pas dans l'abaissement du coût du travail, pas dans la réduction du niveau de la protection sociale - cela n'empêche pas de faire des économies. La compétitivité, elle est sur l'innovation, sur l'investissement, sur la formation, sur l'éducation, sur la recherche ! C'est ainsi que nous serons meilleurs !
Il nous faudra aussi agir à l'échelle de l'Europe. Rien n'est possible sans une Europe qui protège et se protège, sans le respect de la réciprocité commerciale des échanges. Ceux qui veulent vendre leurs produits en Europe sont les bienvenus - c'est la règle de l'échange -, mais ils ne peuvent le faire qu'à condition de remplir des exigences sanitaires, sociales, environnementales, celles que nous imposons, ici, à nos entreprises et à nos salariés. Je suis pour que les produits circulent, pour que les marchandises puissent être fabriquées là elles auront la meilleure qualité. Mais je ne suis pas pour le dumping, pour fragiliser nos propres entreprises. On le voit sur le raffinage, aujourd'hui, à Petroplus. Je pense aussi aux salariés de Sandouville, qui viennent d'apprendre qu'ils seront mis au chômage partiel pendant plusieurs jours. Eux dont l'usine était le site de haut de gamme de Renault en France ne produisent plus, ou si peu, alors qu'on voit débarquer, à quelques kilomètres de l'usine, sur le port du Havre, des véhicules - les mêmes - venus de Corée du Sud. Comment l'admettre, quand, en plus, l'actionnaire est pour partie public ?
Nous en revenons à la question fondamentale. Que pouvons-nous ? Que voulons-nous? Sommes nous un pays encore capable de relever la tête et de poser sa voix ?
Le redressement ne sera possible que si la finance est dominée. J'ai dit que la finance n'avait pas besoin de déposer sa candidature. Elle ne sera pas invitée au journal de TF1 ce soir. Elle n'a pas besoin de poser sa candidature, parce que, hélas! elle domine sur le plan politique. Or c'est la démocratie qui doit avoir le dernier mot. Non pas que nous n'ayons pas besoin de banques, de financiers, d'épargne pour qu'il y ait de l'investissement et de la création - nous en avons besoin -, mais tant d'excès ont été commis sous nos yeux en vingt ans. La finance a pris le contrôle de l'économie et, à travers elle, le contrôle de la société et de nos vies mêmes. Combien de salariés m'ont expliqué que leur usine fermait, non pas parce qu'elle n'était plus compétitive, mais parce que le taux de rentabilité demandé par la finance était devenu si élevé qu'elle ne pouvait plus tourner pour satisfaire cette exigence. Face à la finance, les grandes déclarations, les promesses de régulations, les incantations, les « plus jamais ça » sont restés lettre morte. L'un d'entre vous évoque la Moselle : aujourd'hui, à Florange, les hauts-fourneaux sont à l'arrêt. Et à Gandrange, qu'est devenue la promesse de garder le site ? Pouvons-nous admettre, là aussi, que des fleurons de notre industrie soient ainsi mis en cause ? Oui, il nous faudra mettre bon ordre !
Je vois aujourd'hui les dérives de ce système, y compris pour notre Europe et pour la zone Euro, où les agences de notation sont devenues toutes-puissantes et décident du sort des dettes souveraines des pays, provoquant des plans de rigueur de plus en plus douloureux. Et la spéculation continue, continue encore d'ébranler la zone Euro ! Avez-vous vu la situation de la Grèce, mise à genoux, avec une économie qui n'en peut plus et une Europe qui n'est pas là, en tous cas qui n'est pas suffisamment là ou qui n'a pas été là suffisamment vite pour arrêter le processus et lever la défaillance ?
Voilà pourquoi j'ai pris plusieurs engagements pour maîtriser la finance. Les activités des banques utiles à l'investissement et à l'emploi seront séparées des activités spéculatives, pour qu'il n'y ait aucun risque de contagion. Aucune banque française ne pourra plus avoir d'activité dans les paradis fiscaux et les produits financiers toxiques, qui hélas! demeurent encore aujourd'hui et enrichissent les spéculateurs, seront purement et simplement interdits. Les stock-options seront supprimées. Les bonus seront encadrés. Et je proposerai une véritable taxe sur les transactions financières, et pas un ersatz, un succédané tel qu'on nous le propose aujourd'hui. Voilà le préalable à tout : dominer la finance.
Ensuite, reste notre responsabilité. Ce serait trop simple s'il suffisait de désigner l'adversaire, puis de nous exonérer de notre propre action. Quelle est la responsabilité de notre génération ? C'est de réussir la transition, transition entre un monde ancien qui s'épuise sous nos yeux et un monde nouveau qui tarde à émerger, transition entre des modes de production, des modes de consommation, des modes de transport. Nous devons être les acteurs de cette mutation.
Ceux qui vont diriger la France pendant les cinq ou dix ans à venir doivent avoir cette grande mission. La transition économique pour sortir de la crise avec plus de force et d'atout pour la France de la mondialisation. La transition technologique pour que nous puissions mettre le numérique, l'internet, les réseaux de communication au service de notre vie courante, mais aussi de nos entreprises et de nos emplois. La transition énergétique pour préparer l'après-pétrole, réduire le réchauffement climatique, faire monter les énergies renouvelables et diminuer progressivement notre dépendance au nucléaire. Nous avons besoin, là encore, d'inventer des politiques. La transition écologique pour reconvertir nos bâtiments, isoler nos logements, stocker l'énergie, inventer les véhicules électriques. Cela tombe bien : on les fabrique ici, à Cléon ! Transition pour renforcer l'économie verte, l'économie de demain, mais aussi transition éducative pour imaginer les nouveaux savoirs, les formations d'avenir, les pédagogies nouvelles et lutter contre l'échec scolaire, qui ne doit pas être une fatalité, un déterminisme, une punition. Transition territoriale pour donner une confiance nouvelle aux collectivités locales. Ce sera un nouvel axe de décentralisation que nous poserons. Transition générationnelle pour assurer la solidarité entre les âges, transmettre les expériences, faciliter l'allongement de la vie et, en même temps, accueillir les jeunes. Solidarité entre les âges, c'est l'idée du contrat de génération : permettre que les seniors puissent former les jeunes, partir à la retraite dans de bonnes conditions et laisser les jeunes en contrat à durée indéterminée venir dans l'emploi.
Oui, belle idée de la transition. C'est un beau projet : être des passeurs, des relais, des intermédiaires, des liens entre les individus, les territoires, les générations.
Nous vivons une période exceptionnelle, une crise globale, à la fois économique, sociale, culturelle, environnementale. Elle ne doit pas être regardée comme une fatalité, mais comme un défi. Sommes-nous capables de le relever ? La France, notre France a traversé bien des épreuves, surmonté bien des conflits, vécu révolutions, guerres, mouvements sociaux en restant toujours la France, à la condition de ne jamais perdre le cap, celui de la République et de nos valeurs, et de la fierté d'être ensemble. Nous avons toujours été capables de surmonter les tragédies ou les épreuves du destin. Il faut une vision, une volonté, une solidarité, une unité. C'est ce qui a manqué, terriblement manqué au cours des dernières années. Et ce sera l'enjeu de l'élection présidentielle.
Chers amis, bientôt arrive l'heure du choix. La France doit déterminer son avenir. Entre la continuité et le changement, je lui propose le changement. Pas seulement un changement de président - c'est la condition -, mais un changement de politique, de méthodes, de perspectives, de destin. Vous connaissez la nouvelle du jour. Peut-être n'est-elle pas venue jusqu'à vous ?... Le président-candidat est désormais candidat-président. Quelle nouvelle! Quel bouleversement! Quelle sensation! Mais je vais vous faire une confidence : moi, je m'en doutais. Cette nouvelle, nous la connaissions depuis des semaines, depuis toujours. La vérité, c'est que le président-candidat est candidat depuis cinq ans. A peine élu, il était déjà en campagne. A peine entré, il était déjà sortant.
Il ne s’est pas passé une semaine depuis 2007 sans qu’il n’agisse dans ce but. Pas une semaine sans calcul politique, sans mesure catégorielle, sans promesse. Pas une semaine sans que les moyens de l’Etat, ceux de l’audiovisuel, ne soient au service d’un homme, d’une carrière, au service d’une Droite qui n’a qu’une seule idée, une seule : rester au pouvoir.
Mais maintenant que les choses sont dites ou vont l’être, que les actes sont posés, que les déclarations sont faites, je souhaite pour la France un débat digne et à la hauteur de l’enjeu. C’est de notre pays qu’il s’agit, pas de nos sorts personnels. Ce n’est pas simplement une affaire de partis, une affaire qui voudrait nous opposer les uns les autres. Non, il s’agit du destin de chacun et du destin de la France, cette France qui souffre. Et à un moment où beaucoup de nos concitoyens sont en défiance par rapport à la politique, sont tentés même d’aller chercher vers l’extrême, l’extrême droite, des réponses à des problèmes qui sont posés mais dont aucun ne trouvera sa solution dans les discours de haine, d’exclusion, de repli, de fermeture. La France mérite mieux que ça ! La France, c’est la République. La France, c’est la liberté, la fraternité. La France, c’est ce n’est pas le repli, le rejet, la peur !
Je sais ce qui nous attend pour ces quelques semaines qui nous séparent du premier tour. Car tout va se jouer au premier tour de l’élection présidentielle. C’est là qu’il va falloir créer la dynamique, c’est là qu’il va falloir porter haut nos couleurs pour être le plus haut possible au premier tour, pour ne pas créer de doute sur la qualification et sur la victoire.
Chers amis, je sais ce qui nous attend. Le scénario est écrit. Le candidat sortant nous promettra du neuf, il tentera de faire de ses faiblesses une force. Le président s’est trompé pendant cinq ans, mais justement, ce sera son expérience… On nous dira : « il a gouverné pendant cinq ans, il sait donc ce qu’il ne faut pas faire. Il connaît les erreurs à éviter ». La preuve c’est qu’il les a toutes commises ! Il prétendra que les vieilles recettes de l’austérité sont des remèdes du XXIe siècle. Il assènera que les Français vivent au-dessus de leurs moyens et qu’il faut les mettre à la diète. Il confessera que le passé ne compte pas, qu’il faut oublier le bilan, que la crise est passée par là, que tout s’efface et que seul l’avenir compte. Il nous dira qui si l’on a fait les choses à l’envers — et c’est vrai — il suffira de les remettre à l’endroit. Certains beaux esprits, il en existe, nous conseillerons de faire confiance au président, pour la simple et bonne raison qu’il est le président. Encore faudrait-il qu’il se soit comporté en président et qu’il ait inspiré confiance ! Mais c’est sa politique qu’il faut changer. Elle a été dure pour les faibles et douce pour les puissants. Il vient sans doute — ou il va le faire — d’annoncer sa candidature. J’ai repensé à une phrase que François Mitterrand avait lui-même prononcée il y a trente ans lorsque le président sortant, Valéry Giscard d’Estaing, s’était lui-même déclaré. Il avait dit que plutôt que de présenter sa candidature, il aurait mieux fait de présenter ses excuses… Je ne sais pas si la formule vaut encore, mais c’est vrai qu’il y aurait des excuses à formuler pour le bilan, pour une politique qui a échoué, pour des promesses non tenues, pour une politique qui a systématiquement enrichi les riches, favorisé les favorisés et privilégié les privilégiés.
Car qui va mieux depuis cinq ans : les ouvriers, les employés, les agriculteurs qui peinent, les chercheurs qui vont mal, les professeurs dont on a supprimé les emplois, les commerçants, les artisans ? Qui va mieux en France ? Eh bien oui, je vais vous le dire, c’est un peuple très spécial, un peuple particulier, un peuple à part, un peuple qui vit en fait au-dessus du peuple, c’est le peuple des importants, le peuple des possédants, le peuple des dirigeants. Celui-là va mieux depuis cinq ans !
La politique actuelle, je sais où elle nous a menés. Le chômage est au plus haut, la croissance au plus bas, les profits sont à la hausse, le pouvoir d’achat est à la traîne, la compétitivité est affaiblie, la précarité renforcée, le déficit commercial se situe à un niveau exceptionnel, la dette atteint un record historique, les droits essentiels ont reculé — le travail, la santé, la retraite, le logement -, les inégalités se sont creusées, des cadeaux fiscaux ont été accordés aux plus favorisés, et les prélèvements se sont abattus — pas moins de quarante depuis 2007 sur tous les Français !
Ce quinquennat avait commencé par un bouclier pour protéger les plus riches. Il s’achève par une massue, celle de la TVA sur la tête des Français. Ce n’est pas un bilan, c’est un fiasco. Et je suis aussi sévère à l’égard de la politique qui a été menée au nom de l’Europe. Depuis deux ans, seize « sommets de la dernière chance » se sont tenus, et la Grèce en est toujours au même point, affaiblie, soumise, incapable de se redresser. Le pays est désespéré, la rue s’embrase, et les fonds n’ont toujours pas été libérés.
La France elle-même se trouve dégradée et contrainte de renoncer à toutes ses ambitions, sur le rôle de la Banque centrale européenne — qui serait si précieuse en ce moment -, sur la gouvernance économique, sur la mutualisation des dettes européennes. Voilà le sujet, voilà pourquoi il faut changer ! Et c’est parce que ce bilan est finalement difficile à présenter pour le candidat sortant qu’il tente de s’en échapper en évoquant les valeurs. Les valeurs — mais c’est pour mieux stigmatiser, pour mieux exclure. On cherche à opposer, à diviser, à déchirer. On invoque même une prétendue hiérarchie des civilisations ! Eh bien je dis non, la République ne le permettra pas. Nous ne laisserons pas faire, nous lutterons de toutes nos forces pour une société qui rassemble, pour une France qui réunit, pour une République qui réconcilie.
Et je fais ici cette promesse, si les Français m’en donnent mandat : je ne serai pas le président qui divise, je serai le président qui accueille, rassemble, réunit. Je ne serai pas le président qui distingue entre les hommes, entre les cultures, entre les religions, entre les opinions politiques ou partisanes. Je serai le président qui s’adressera aux Français dans ce qu’ils ont de meilleur.
La campagne sera celle des bilans, celle des projets, celle des personnes — et c’est légitime lorsqu’il s’agit de choisir le prochain chef de l’Etat. Mais la campagne sera aussi celle des valeurs, dont le prochain président devra être l’incarnation et le garant.
Les valeurs, parlons-en.
La première de mes valeurs, c’est la vérité. Sans elle, il n’y a pas de débat qui éclaire, il n’y a pas de projet qui tienne, il n’y a pas de promesse qui vaille, il n’y a pas de parole publique qui soit respectée. Sans la vérité, il n’y a pas de démocratie.
Je veux réhabiliter le politique, restaurer la vie civique. La situation est trop grave pour que nous puissions nous payer de mots. Je dirai la vérité, même si elle est difficile à entendre, et d’abord que nous ne pourrons pas tout faire, que nous ne pourrons pas tout promettre, que le début de notre quinquennat sera difficile, qu’il sera marqué par l’effort, mais dans la justice. C’est ensuite, une fois le redressement obtenu, que nous pourrons partager les fruits d’une croissance revenue. Le chemin que je montre est exigeant, mais au bout il y a le rétablissement de l’économie, il y a la solidarité financière et il y a les droits des citoyens étendus. Dire la vérité, voilà ce que je dois d’abord au peuple français, peuple adulte, peuple libre, peuple lucide. Voilà mon devoir.
La deuxième valeur que je porte, c’est le travail. La République veut que le talent, l’effort, le risque soient récompensés. Mais où est le respect du travail quand trois millions de nos concitoyens sont au chômage ? Où est le respect du travail quand les plus jeunes sont condamnés à la précarité, faute de disposer d’un contrat à durée indéterminée ? Où est le respect du travail quand les revenus du capital sont moins imposés que les revenus du labeur ? Où est le respect du travail quand ceux qui ont commencé tôt leur vie professionnelle sont obligés d’attendre 62 ans pour partir à la retraite ? Où est le respect du travail quand les patrons du CAC 40 s’augmentent de 34 % pour une rémunération moyenne de 4 millions d’euros par an — 240 années de Smic — et quand les mêmes considèrent que relever le Smic serait prendre un risque pour l’économie elle-même ?
Eh bien je vous le dis, le travail doit être réhabilité, et nous y mettrons bon ordre. Nous créerons d’abord 150 000 emplois d’avenir pour les jeunes, et notamment dans les quartiers les plus difficiles. Nous introduirons le contrat de génération, celui qui permet à un employeur de garder un senior le temps qu’il puisse partir à la retraite, et d’embaucher un jeune avec un contrat à durée indéterminée, le senior faisant la transmission de la connaissance et du savoir au jeune. Nous permettrons à tous ceux qui ont leurs 41 années de cotisation et qui ont commencé à travailler tôt de pouvoir partir à la retraite à 60 ans. Nous modulerons les cotisations chômage en fonction de la part des contrats précaires. Il n’y a pas de raison que les entreprises qui embauchent à contrat à durée indéterminée payent autant de cotisations chômage que les entreprises qui embauchent par intérim ou par CDD ! Nous plafonnerons les rémunérations dans le service public : l’écart sera d’un à vingt. Et dans le secteur privé, au-delà du rôle que peut jouer la fiscalité, je fais la proposition que des représentants des salariés puissent participer aux comités de rémunération qui fixent précisément les salaires, les primes et les bonus des dirigeants. Voilà comment nous réhabiliterons le travail, qui est une belle valeur. Jean Jaurès disait : « Le travail c’est la liberté, c’est l’accomplissement, c’est l’émancipation ».
Ma troisième valeur, c’est la justice. L’âme de la République, c’est l’égalité. La solidarité n’est pas l’assistance ! Et dans une société civilisée, dans la République du XXIe siècle, personne ne doit être laissé sur le bord de la route. Chacun a droit à la sollicitude de la République. Les faibles, les oubliés, les handicapés doivent être défendus, promus. Bien sûr — et je l’entends -, chacun doit faire sa part de l’effort. Aucune subvention ou allocation ne doit être versée sans contrepartie, parce que c’est aussi ça, le contrat social dans la République. Chacun doit montrer l’exemple. Mais moi, je ne stigmatiserai pas le chômeur en disant qu’il est responsable de sa condition. Il est une victime. Ceux qui sont responsables du chômage, ce sont ceux qui ont dirigé le pays ! Je ne dirai pas que les malades sont responsables de la maladie. Nous avons le devoir de faire que l’égalité entre tous les citoyens soit une égalité de droit, et aussi de responsabilité. Je veux une France solidaire, parce que je veux une France juste et une République forte. Je vais vous dire une chose toute simple, c’est que la France n’est forte que si elle est juste. Si elle n’est pas juste, c’est là qu’elle s’affaiblit, c’est là qu’elle s’amoindrit.
Le redressement se fera dans la justice. Je tiendrai l’engagement de réduction des déficits, parce que je veux désendetter l’Etat et le pays. J’ai annoncé une réforme fiscale. Elle visera à faire peser l’effort sur ceux qui peuvent le supporter. Chacun contribuera en fonction de sa capacité. Nous montrerons aussi du sérieux dans la dépense. Il y a des économies à trouver ; il y a du superflu et nous le trouverons. Mais les investissements d’avenir seront protégés, l’éducation, l’école parce qu’elle est au cœur de tout, parce que j’ai pris un grand engagement dans cette campagne présidentielle, c’est de faire de la jeunesse la priorité majeure du prochain quinquennat. Non pas pour la jeunesse en tant que telle, mais pour tout le pays, pour nous rassembler autour de son avenir. L’éducation, parce que nous avons à la fois à porter le niveau de l’excellence et en même temps à lutter contre l’échec scolaire. Je dis l’éducation, je devrais dire aussi la connaissance, la culture, bref tout ce qui élève une société et permet à chacun à la fois de réussir sa vie, de contribuer à la réussite collective et en même temps d’être un citoyen exemplaire.
Aucune dépense nouvelle ne pourra être décidée sans chercher l’économie ou la recette correspondante. En 2017, au terme du prochain quinquennat, nous aurons atteint l’équilibre budgétaire. La France que nous voulons, ce n’est pas la France de la dette, c’est la France de la justice.
Enfin, il y a d’autres valeurs qui me viennent à l’esprit. Le respect d’abord.
Le respect des institutions, partout et pour tous, et d’abord pour le chef de l’Etat, qui doit donner l’exemple. Pas simplement par son statut, où il doit être responsable de ses actes, pas simplement par sa rémunération — même s’il doit là aussi faire les gestes qui conviennent — mais par sa conception du pouvoir. Le président de la République tel que je le conçois ne peut pas décider de tout, sur tout, et en fait n’être responsable de rien. Il doit donner les grandes orientations, rassembler la Nation autour de grands objectifs, d’une vision.
Je rétablirai dans toute sa dimension la fonction de premier ministre — je ne parle pas de celui qui est aujourd’hui à Matignon, je parle du prochain… Les ministres exerceront leur compétence. Les droits du Parlement seront renforcés. La démocratie sera rendue plus vivante. Le non-cumul des mandats sera instauré. La proportionnelle sera introduite. La parité sera respectée, et les partis qui s’en échapperont devront perdre toute subvention venant de l’Etat. Les partenaires sociaux seront considérés, leur rôle sera même précisé dans la Constitution. Un nouvel acte de décentralisation sera posé pour donner toute leur force aux territoires.
Le respect. Le respect aussi de la loi. Le respect pour qu’aucune fraude ne soit tolérée — fraude fiscale, fraude sociale -, pour que chacun soit conscient du tort qu’il inflige à la Nation. Le respect, c’est aussi celui d’avoir des lois qui s’appliquent partout, et le droit à la sécurité qui doit être reconnu. La violence progresse. Depuis dix ans, les violences aux personnes ont augmenté de 20 %. Les agressions les plus violentes se sont multipliées. Eh bien, nous ne céderons rien contre ce fléau qui touche les plus fragiles. Nous augmenterons les effectifs de Police et de Gendarmerie. Nous les répartirons sur le territoire différemment, là où il y a effectivement le plus de besoins. La justice aura les conditions pour être plus rapide dans ses décisions : 120 000 décisions, aujourd’hui, ne sont pas exécutées ! La protection judiciaire de la jeunesse sera renforcée. Parce que nous avons besoin, là, d’éviter que des jeunes qui ont connu des défaillances puissent connaître la récidive. Il y aura des établissements à chaque fois différents, selon les actes qui auront été commis par ces jeunes délinquants. C’est un droit que nous devons poser. Je défie d’ailleurs quiconque qui voudra aller chercher la Gauche sur ce terrain-là ! Celui qui s’y est essayé depuis dix ans, qui avait fait de la lutte contre l’insécurité son cheval de bataille, a été désarçonné par la situation. Eh bien nous, nous montrerons que nous avons les réponses, sans rien occulter des causes économiques, des causes sociales, mais sans rien excuser des responsabilités individuelles.
Il y a une autre valeur, la dignité. La dignité humaine. C’est elle qui nous fera engager une grande politique du logement et du logement social, parce qu’il est inacceptable de ne pas avoir un toit, de ne pas vivre décemment, de ne pas pouvoir fonder une famille, ou pour un jeune de ne pas pouvoir connaître l’autonomie ou l’indépendance.
C’est également au nom de la dignité que je rétablirai l’égalité des Français dans l’accès aux soins. Parce qu’il m’est insupportable que des femmes, des hommes, des personnes âgées, des jeunes soient contraints de renoncer à se soigner pour des raisons financières.
C’est au nom de la dignité que je veillerai à l’égalité salariale hommes-femmes et que je protégerai les femmes des violences dont elles sont trop souvent victimes. C’est au nom de la dignité que je permettrai à chacun de vivre selon son orientation sexuelle. C’est au nom de la dignité que je proposerai que toute personne majeure en phase avancée ou terminale, incurable, d’une maladie provoquant une souffrance physique, psychique insupportable et qui ne peut plus être apaisée, puisse demander dans des conditions précises et sous contrôle de plusieurs médecins, à bénéficier d’une assistance médicale pour vivre sa vie dans la dignité jusqu’à la fin.
Voilà cette politique, voilà mes valeurs. Elles ont un nom, c’est le progrès. Je crois au progrès, au progrès économique, au progrès scientifique, au progrès social, au progrès humain, au progrès éducatif. C’est ce qui a fait que la génération qui vient doit vivre mieux que la nôtre. Le progrès, c’est que les parents doivent savoir que leurs enfants auront un avenir meilleur que le leur. C’est ça le rêve ! C’est ça le rêve républicain ! C’est ça qui fait que depuis la Révolution française, à travers les grandes conquêtes, à travers les grandes luttes, génération après génération, la France a été capable de porter cet idéal, de donner confiance et d’être fière d’elle-même.
La France doit progresser, sur tous les plans en même temps. On ne peut pas avoir d’un côté la modernisation économique et, d’un autre côté, la régression sociale et le conservatisme sur les mœurs. C’est tout le mouvement qui nous fera avancer. Nous sommes le parti – je suis le candidat du mouvement, du progrès, de l’avancée, de la conquête, du siècle qui vient !
Et la plus haute, la plus belle de nos valeurs, celle qui les résume et qui les englobe toutes, c’est la République. Une République unie. Une République laïque, parce que la laïcité, tout simplement – et elle n’a pas besoin d’épithète pour être plus forte –, la laïcité est la valeur qui protège et qui libère. Je lutterai avec détermination contre toutes les dérives communautaires. Et j’ai proposé d’inscrire les principes de la loi de 1905 dans la Constitution, pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de doute sur nos intentions, dans le respect de la liberté de conscience, de la liberté religieuse. Parce que c’est cela, aussi, la loi de 1905 – celle qu’avaient voulue Jaurès, Aristide Briand et tant d’autres : donner de la liberté et, en même temps, faire en sorte que nul ne soit inquiété parce qu’il croyait ou qu’il ne croyait pas, et parce que l’école devait être protégée de toutes les influences.
Et si d’aventure tel ou tel groupe, d’où qu’il vienne, voulais s’ériger en lobby pour le compte d’un courant hostile à la liberté, je l’annonce : il trouverait la République sur son chemin !
Chers amis, une élection présidentielle – moment si important, instant si décisif, mobilisation si puissante –, c’est aussi parler au peuple. Parler au peuple, c’est l’élever autour d’une grande cause : le redressement dans la justice, l’espérance dans la République. Parler au peuple, c’est exalter notre fierté commune, notre histoire, nos réussites, notre vitalité, nos atouts. Parler au peuple, c’est s’adresser au meilleur de chacun d’entre nous, de ce qu’il a de plus fécond, de plus fertile, de plus inventif, de plus heureux. Ce n’est pas s’adresser à la part d’ombre que nous pouvons, nous aussi, quelles que soient nos valeurs, avoir au fond de nous. Parler au peuple, ce n’est pas flatter les instincts de la facilité. C’est ne pas désigner les chômeurs comme des responsables. C’est ne pas considérer la jeunesse comme un fardeau, ou les étrangers comme une menace. Parler au peuple, et je le ferai, c’est promouvoir l’essentiel, ce qui élève, ce qui redresse, ce qui unit. C’est considérer que chacun, chacune, ici, ailleurs, est un atout pour la France. Parler au peuple, c’est savoir que le cœur n’est pas une pulsion, que la raison n’est pas le sens commun, que la démagogie n’est pas la démocratie, que la flatterie n’est pas une marque d’affection mais de mépris.
Le peuple français est un grand peuple politique. Il sait ce qui lui a été promis, annoncé, proclamé – et qui n’a pas été tenu. Je fais confiance au peuple français pour savoir ce qu’il a à faire. Et, en même temps, je veux redonner confiance à la France. J’ai entendu que le candidat sortant – parce qu’à cette heure, il a dû faire sa déclaration ! – annonçait une pluie de référendums. En cas de réélection, les Français seraient consultés sur le chômage. Peut-être avec la question « êtes-vous pour ou contre le chômage » ? Consultés sur la formation : « êtes-vous pour ou contre la formation ? » Consultés sur les étrangers – ah, on voit déjà un peu plus de malice ! Consultés sur la règle d’or – pas besoin d’être consultés sur la règle d’or, puisque nous aurons à prendre des engagements et que nous les respecterons. Curieuse position, quand même, quand pendant cinq ans, le même s’est refusé à consulter le peuple français quand il lui a été fait, à tort ou à raison, la demande sur les retraites, sur le nucléaire et – pourquoi pas ? – sur la TVA sociale ! Curieuse conception, et en tout cas ce n’est pas la mienne, de nos institutions. Moi, je crois au Parlement, à sa capacité à nous représenter, à trancher les débats. Je crois aussi à la citoyenneté. Il y a bien d’autres formes de consultation que celle simplement de répondre par oui ou par non à une question. Je crois à la démocratie, qui suppose la connaissance, la réflexion commune, la délibération collective. Curieuse conception que d’inventer des consultations à la veille d’une élection…
Eh bien, moi, je vais vous annoncer que le seul référendum que je connaisse, le seul qui comptera, c’est le 6 mai prochain. C’est l’élection présidentielle ! Et j’ai même trouvé la question qui sera posée à nos concitoyens. « Voulez-vous poursuivre cinq ans de plus avec le même président ? » « Voulez-vous changer de président, de politique, de méthode, de majorité ? » Eh bien voilà le référendum qui va arriver le 6 mai, si vous arrivez aussi à mobiliser les Français autour de cette grande consultation !
Mes chers amis, la tâche qui nous attend est immense : redresser nos comptes publics, notre industrie, notre économie ; faire prévaloir la justice ; restaurer nos valeurs, celles de la République ; donner une espérance, celle de la jeunesse. Et, en plus, il nous faudra réorienter l’Europe. Il faut, certes, des disciplines au sein de la zone euro. Elles sont nécessaires. Il faut que chacun les respecte – sinon, il n’y a pas de monnaie unique possible. Nous devons coordonner nos politiques économiques – c’est indispensable si nous voulons agir dans le même espace. Mais j’ai indiqué qu’il faudra aussi donner priorité à la croissance. Sinon, nous n’atteindrons aucun de nos objectifs de maîtrise de la dette et de retour à l’équilibre. C’est cette dimension-là qu’il faut apporter aux traités européens!
J’ai compris que Madame Merkel avait des positions fermes là-dessus. Je les respecte. Et qu’elle soutenait d’autant plus le candidat sortant qu’il ne la contredit plus depuis longtemps ! Elle a bien le droit. Elle peut avoir ses préférences. Et lui peut chercher son soutien – et je ne m’en plaindrai pas. Ce que nous aurons à faire, au lendemain de l’élection présidentielle, si les Français m’en donnent mandat, ce sera de convaincre – la Chancelière, mais aussi les chefs de gouvernement, qui nous regarderont un peu curieusement, sans doute. Mais c’est le peuple français qui nous aura donné de la force ! Parce que quand le peuple français s’est exprimé dans une élection présidentielle, quand le peuple français a investi un candidat qui est devenu président, eh bien la force du président entrant est très différente de la force du président sortant !
Beaucoup en Europe, et pas simplement dans les partis progressistes, attendent notre victoire : pour donner une nouvelle dimension aux traités européens, sur l’intervention de la Banque centrale européenne, sur la capacité d’emprunt de l’Europe, sur les grands projets industriels et énergétiques. Là encore, c’est le peuple français qui sera déterminant, parce que c’est lui qui fournira une partie de la réponse – pas toute la réponse. Evitons de pêcher par arrogance en considérant que nous serions le seul peuple à décider du reste. Mais je sais que ce que les Français décideront le 6 mai vaudra pour la France, mais influencera l’Europe tout entière. C’est dire notre responsabilité, votre responsabilité ! Le vote du 6 mai est un vote pour la France et pour l’Europe. Il induira un changement en France, mais il provoquera aussi un changement en Europe. Nous sommes attendus. Nous sommes espérés. Nous sommes regardés, en Europe et dans le monde. Laurent Fabius l’évoquait : la France n’est pas n’importe quel pays : la France des droits de l’homme, la France des libertés, la France de la culture, la France de la solidarité, la France des valeurs universelles ! Vous êtes ce peuple-là, un grand peuple qui doit être à la hauteur de sa tâche historique ! Que ceux qui doutent – et j’en connais –, que ceux qui s’inquiètent, que ceux qui craignent le déclin se disent que lorsqu’on a cette histoire-là, qu’on a surmonté tant de difficultés, quand on a été porté par des hommes et des femmes d’excellence pendant toutes ces décennies, alors chacun doit être fier ! Fier de cette histoire, fier de son pays, fier de sa capacité à changer – changer le cours de l’Europe et, peut-être même, le cours de l’humanité !
Chers amis, nous sommes à 66 jours du premier tour. Je les compte ! Chaque jour ! Et pour l’instant, nous sommes sur la bonne trajectoire. Mais nous ne savons pas ce que sera demain. Cela dépendra de vous. Oui, nous sommes à 66 jours du premier tour. Moi, je suis en campagne depuis près d’un an. Je vais fêter, bientôt, ce premier anniversaire – mais enfin, cela va bientôt s’arrêter ! Je ne me préoccupe pas des autres. Je ne me détourne pas de mon objectif : gagner, faire gagner la Gauche, faire avancer la France. Je suis sur ma ligne. Je ne m’en dévie pas. Je ne regarde pas derrière, pas devant non plus. En tout cas pour l’instant. J’ai compris que d’autres s’étaient élancés. Eh bien, le débat est engagé ! Il va s’intensifier – et, je l’ai dit, je souhaite qu’il se situe à la bonne hauteur. Mais je sais par expérience que rien ne nous sera épargné. A moi-même, mais je suis résistant. A la Gauche, mais elle saura se rassembler. Aux Français eux-mêmes, qui peuvent se laisser parfois impressionner. Toutes les grandes élections présidentielles se résument souvent en une confrontation entre la peur et l’espoir.
On voudra – à mesure qu’une possible victoire se dessinera, mais nous n’en sommes pas encore là – faire peur. On dira que si nous gagnons, la France risque d’être dégradée. Mais c’est fait ! Que les caisses seront vidées. Mais c’est fait ! Que l’argent va partir. Mais c’est fait ! On dira tant de choses, tant de choses fausses. Que nous allons régulariser tous les sans-papiers, alors que 30 000 le sont chaque année par le gouvernement. Et ce qui sera notre responsabilité, ce sera de fixer des critères qui vaudront partout, pour tous, sans qu’il soit besoin d’arbitraire. On nous dira que nous sommes des laxistes, alors que j’ai démontré le contraire et que la Droite a laissé les violences aux personnes progresser de 20 %. On nous dira que nous voulons détruire la famille, alors que nous allons augmenter l’allocation de rentrée scolaire et que nous allons donner priorité à l’école – ce qu’attendent tant de familles en France, avec ces suppressions de postes et de classes. Nous croyons en la famille, à la vitalité démographique, à l’accueil des enfants ! Nous savons que la jeunesse sera notre chance !
Alors, ne vous laissez pas impressionner, intimider. La Droite a toujours joué avec les peurs. En 1936, le Front populaire inquiétait déjà. Et puis, en 1981, que disait-on ? Certains voyaient même les chars soviétiques sur la place de la Concorde ! Certains sont restés place de la Concorde tout au long du mois de mai, jusqu’au 14 juillet. Et qu’ont-ils vu ? Défiler des chars français devant François Mitterrand, le 14 juillet 1981.
La Droite a toujours joué avec les peurs. C’est ainsi que, depuis longtemps, elle veut garder le pouvoir qu’elle considère comme sa propriété. Comme si elle était la seule légitime à pouvoir diriger la France. Je ne sais pas pourquoi. Par héritage ? Par privilège ? Par conception particulière de leurs talents ? Lesquels ? De leurs mérites ? Lesquels ? De leurs réussites ? Mais lesquelles, encore ? Non !
C’est la Gauche qui a toujours redressé le pays à des moments décisifs de notre histoire !
Et nous, nous devons non pas faire peur, mais donner espoir. Espoir dans le redressement, espoir dans la justice, espoir dans la jeunesse, espoir dans la République, espoir dans la France, espoir dans l’avenir. Voilà ce que nous avons à porter : un rêve français. Vivre mieux. Avancer. Progresser. C’est le sens du projet que je porte. Face à la crise qui affecte notre pays, je propose un chemin : celui de la République, celui de ses valeurs. Plutôt que l’argent, l’intérêt général. Plutôt que les inégalités, la justice. Plutôt que la stigmatisation, l’unité et le rassemblement. Je veux rassembler le pays. Je veux l’union plutôt que la division et les dissensions. Je veux le respect et la concorde plutôt que la brutalité et les querelles.
Je ne convaincrai pas tout le monde, si j’arrive à être élu – ce qui n’est pas encore fait, et loin de là. C’est terrible de penser que tous les Français ne vont pas voter pour nous. Mais en même temps, c’est la démocratie. C’est le droit de chacun. Eh bien, je vous le dis, aujourd’hui, ici, en Normandie : nous devons rassembler ! Rassembler les Socialistes : c’est fait depuis longtemps, ils sont là. Rassembler la Gauche : nous avons besoin de toute la Gauche, de toutes ses sensibilités – communiste, écologiste – parce que c’est la Gauche qui donne la victoire, qui donne la force ! Mais nous devons aussi rassembler les Français, n’écarter personne, ne rejeter aucun concours. Et même ceux qui n’auront pas voté pour nous seront les bienvenus après l’élection présidentielle pour travailler au redressement de notre pays.
Voilà le sens de la présidence que je vous propose. Voilà le temps politique que je veux ouvrir. Celui d’une Gauche rassembleuse, capable de se mettre à la hauteur de la France. Une Gauche efficace, comme elle l’a toujours fait dans son histoire, avec Pierre Mendès France, avec Pierre Bérégovoy – lui aussi, grand Normand, grand Français dont je salue la mémoire. Oui, la Gauche est sérieuse ! Mais la Gauche doit être aussi audacieuse, créative, pleine de projets, portant aussi la culture comme une force. Une Gauche qui doit avoir non pas le goût du pouvoir, mais le goût de la transformation. Qui doit être aux responsabilités, toujours dans le mouvement, dans le changement. Qui ne doit jamais s’habituer au pouvoir – mais enfin, faudrait-il y rester le temps nécessaire. C’est cette Gauche-là dont la France à besoin ! C’est cette Gauche-là que les Français attendent. L’apaisement, parce qu’il est nécessaire. L’ambition collective, parce qu’elle est indispensable.
J’ai besoin, maintenant, de vous ! Vous citoyens, vous amis, vous la Gauche dans toutes ses sensibilités. J’ai besoin de toutes les forces de la France, pour que nous puissions gagner. Gagner pour nos idées. Gagner pour notre pays. Gagner pour la République. Avec vous, avec votre soutien, avec votre force – vous qui êtes venus si nombreux ce soir !
Oui, j’ai confiance ! J’ai confiance parce que j’ai espoir. Et j’ai espoir parce que j’ai confiance. Le changement arrive ! Il est là, à portée de main !
Le changement, c’est maintenant !
Le changement, c’est le 6 mai ! Et le 22 avril, rendez-vous pour le changement !
Vive la République ! Et vive la France !
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