Mesdames, Messieurs,
Merci de votre invitation dans ce Génopole dans lequel chaque jour des chercheurs - des hommes, des femmes - font avancer la science, pas à pas, avec obstination.
Je crois profondément dans le progrès, et donc à tout ce qui met la connaissance au service de l'amélioration de la vie du plus grand nombre. Il y a encore beaucoup de souffrances à soulager, de conquêtes à accomplir, et d’innovations à partager.
Cette croyance n'est pas aveugle. La science a parfois été mise au service de la déraison. Les leçons tragiques du XXème siècle ne doivent pas être oubliées. L'homme prométhéen peut utiliser le feu qu'il a volé à de très mauvais usages. Mais il convient toujours de distinguer la science des usages qui peuvent en être faits.
Ainsi, la crise environnementale trouve son origine dans les dérèglements de la croissance. Mais là encore, ne faisons pas porter sur la technique elle-même une responsabilité qui revient à la décision politique.
La science peut faire peur. Surtout quand la méfiance est entretenue par les nostalgiques, les frileux, les apeurés, les conservateurs. La crise de l'avenir que nous connaissons est pour partie liée à cette montée de l’irrationnel lorsque l'émotion se substitue à la raison, et l'invective à l'argumentation.
La science est une exigence d'humilité, d'obstination, d'imagination, de liberté, d'esprit critique.
C'est pour cette raison que j'ai choisi d'accorder à l'éducation, à l'enseignement supérieur, à la recherche, et malgré les difficultés et les contraintes qui pèsent si lourdement sur les finances publiques, une priorité.
C'est d'abord un choix de valeurs et une certaine idée de la France.
Faire confiance à la science, cela signifie redonner aux chercheurs des moyens financiers, législatifs – mais aussi la considération qu'ils méritent.
C’est poursuivre le débat éthique. La France a toujours été à l’avant-garde de ces réflexions. Il y a, de ce point de vue, deux principes intangibles : le respect de la dignité humaine, la non-marchandisation du vivant.
Il y a beaucoup à attendre des sciences de la vie. Des pans entiers de connaissance y demeurent largement inexplorés. Les attentes de la société sont immenses : développement embryonnaire, procréation, neurosciences, vieillissement, nutrition, maladies infectieuses... La valorisation des connaissances y revêt un potentiel économique considérable. On évalue à 20% du PIB la part des biotechnologies dans les pays développés en 2030.
Or nous savons, dans les sciences de la vie, qu'il y a beaucoup à attendre de la recherche sur les cellules souches embryonnaires, notamment pour comprendre le processus de la fécondation, pour étudier la conservation des embryons, ou pour faire progresser la compréhension des mécanismes de certains cancers. Et, à long terme, pour ouvrir la voie à des thérapies de médecine régénérative utilisant les capacités de différenciation des cellules souches.
La recherche sur ces cellules est donc riche de promesses pour améliorer notre compréhension des mécanismes biologiques des tout premiers instants de la vie, et permettre, à terme, de soigner et de sauver des vies.
Pourtant, la recherche sur ces cellules est contrariée, dans notre pays, par le dispositif législatif adopté récemment.
Il affiche officiellement une interdiction, mais qui autorise au final les recherches par un système de dérogations.
Où est la clarté, où est l'honnêteté, où est le courage dans cette façon de faire ?
Nous risquons d'en payer le prix fort, c'est-à-dire de perdre l’avance que nous avons dans les domaines de l’innovation thérapeutique, qui reste une excellence française plébiscitée par tant de chercheurs. Je veux leur rendre hommage.
La loi de bioéthique votée en 2002 à l'Assemblée nationale permettait ces recherches : la loi définitive adoptée en 2004 les a interdit, tout en assortissant cette interdiction de dérogations et d'un moratoire. La loi de 2011 a supprimé le moratoire, mais elle a maintenu l'interdiction avec dérogation.
C'est pourquoi, si les Français m'accordent leur confiance le 6 mai, je demanderai immédiatement au Parlement de modifier la loi de bioéthique de 2011 afin d'autoriser la recherche sur les cellules souches embryonnaires.
Aucune raison sérieuse ne s'y oppose.
Une cellule souche embryonnaire n’est pas un embryon et il n’y a aucune objection, au nom de l’éthique, à refuser à des chercheurs de travailler sur des cellules qui sont de toute façon destinées à être éliminées.
Bien entendu, des limites sont nécessaires et la recherche sur ces cellules devra être encadrée. Les recherches seront soumises à des autorisations préalables délivrées par l'Agence de biomédecine, de manière à éviter toute marchandisation du corps humain.
Cet encadrement devra se faire dans le respect des règles de bonnes pratiques internationales.
En autorisant ainsi, de manière encadrée, la recherche sur les cellules souches embryonnaires, nous rattraperons notre retard sur les autres pays qui ont clarifié leur position avant nous : le Royaume-Uni, la Belgique, les États-Unis, le Japon, la Suède, le Brésil…
Nous favoriserons le retour de nombreux post-doctorants qui sont partis effectuer leurs recherches dans ces pays.
Et, même s'il nous faudra faire beaucoup plus - en termes d'effort de recherche, de simplification et de sécurisation des financements, de décloisonnement des disciplines, ou encore de développement d'écosystèmes favorables à l'innovation, à l'image du Génopole -, nous montrerons ainsi notre ferme volonté d'entrer dans le XXIème siècle avec l'ambition, qui doit tous nous réunir, d'améliorer la condition humaine et de répondre par la recherche scientifique à l’attente de ceux qui atteints par la maladie, ont besoin de soin, de sollicitude et d'espérance.
Je vous remercie.
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