Embourbée dans pas moins de 12 recours lancés par la banque d’affaires, propriétaire de 6 parcelles de terrain au cœur de l’îlot « Paul Bert » du futur village Delage (îlot situé entre la rue du Moulin des Bruyères, la rue Villa des Fleurs, l’avenue de Verdun et l’usine Delage), la mairie a été contrainte, pour assurer la poursuite du projet, de se plier aux exigences posées par HSBC pour parvenir à un accord de fin de conflit. Accord qui, après une première tentative avortée en juin 2017, a finalement été soumis au vote du Conseil municipal du lundi 16 octobre et adopté, malgré l’opposition du groupe Tous Pour Courbevoie, seul à voter contre.
La mairie renonce, par cet accord, à exproprier HSBC de ses parcelles, qui, de son côté, s’engage à construire logements et groupe scolaire, obtenant néanmoins de nombreuses évolutions par rapport au projet initial.
Projet initial | Projet HSBC | 4ème étage du projet HSBC |
Un accord qui fait la part belle à la plus-value immobilière d’HSBC, au détriment de l’aménagement urbain prévu et des artisans/ commerçants du site
Conscients de la valeur que pourront prendre les futurs appartements qui seront bâtis sur ses parcelles, à quelques minutes de la future gare du Grand Paris de Bécon-les-Bruyères, proche de la Défense et au milieu d’un quartier qui comptera de nombreux nouveaux bureaux, HSBC a obtenu toutes les concessions nécessaires à la maximisation de sa plus-value immobilière :
Plus de place pour les logements privés…
Sur ses parcelles, HSBC construira 520 logements, au lieu des 415 prévus initialement. Pour augmenter la rentabilité de l’opération, le groupe bancaire a en effet souhaité augmenté le nombre de logements privés à bâtir sur ses parcelles : il y en aura donc 360, au lieu des 290 prévus initialement. Mais en augmentant la proportion de l’espace consacrée à ces logements… il faut nécessairement trouver comment faire rentrer tout de même les autres équipements promis par la mairie : logements sociaux et groupe scolaire notamment.
…Au détriment de l’aménagement urbain et des autres équipements (école et logements sociaux)
Afin de respecter la proportion de logements sociaux promise par le maire (30%), HSBC promet donc 160 logements sociaux au lieu des 125 prévus. Mais impossible de faire rentrer tout ça dans les parcelles imparties sans supprimer le groupe scolaire… à moins que l’on ne mette les logements sociaux SUR le groupe scolaire ! Et c’est la solution qu’a bien évidemment choisi HSBC, et que la mairie a validé ! Et, comme 160 logements sociaux familiaux auraient tout de même eu du mal à tenir sur le groupe scolaire, cela devient une résidence étudiante (comptabilisée comme logement social) : pratique puisque chaque logement ne fait plus que 15 m2 (environ, nous n’avons pas les dimensions exactes).
Ce tour de passe-passe ne suffisant pas à dégager l’espace suffisant au nombre de logements privés voulus par HSBC, il a fallu également raboter de nombreux aménagements urbains initialement programmés :
- suppression de la rue initialement prévue entre le groupe scolaire et l’ancienne usine qui va conduire à l’enclavement du bâtiment Delage pourtant censé être au cœur de ce nouveau quartier !
- une rue Villa des Fleurs qui restera à sa largeur actuelle au lieu de voir ses trottoirs élargis, puisqu’il aurait, pour cela, fallu empiéter sur les logements privés
- un élargissement supprimé aussi sur la rue du Moulin des Bruyères (qui pourtant devait accueillir une « placette » à cet endroit), pour permettre à HSBC de récupérer cet espace afin d’aménager un « préau » pour l’école, dans la mesure où, sinon, l’école ne pouvait plus rentrer dans les parcelles HSBC.
D’ailleurs, avec l’ensemble de ces aménagements, le groupe scolaire essuie les plâtres, se voyant « casé » dans ce qu’il reste de foncier disponible, au détriment du bien-être des enfants !
Un groupe scolaire réduit de 2/3 placé en zone polluée
Cette école, rassemblant 12 classes d’élémentaire et de primaire, était prévue sur une emprise de plus de 3500m2, avec une cour de 1700m2 et se retrouve désormais avec une cour de seulement 500m2 !
Or, d’après les recommandations de l’Education nationale, les dimensions à prévoir pour une cour sont pourtant de 400m2 pour 1 classe puis 100m2 par classe supplémentaire, soit ici : 1500m2 (ce qui explique, d’ailleurs, que initialement, le projet prévoyait une cour de 1700m2). On est donc à ⅓ des recommandations en la matière et l’espace des enfants a été réduit de 2/3 pour qu’HSBC puisse faire de la plus-value sur des futurs logements ! Même logique pour le préau qui se retrouve « casé » sur les parcelles qui ont été récupérées sur la rue..
Le prix assez élevé que la mairie s’engage à payer pour la coque scolaire ( c’est-à-dire la réalisation de l’infrastructure et des fondations) a par ailleurs de quoi interpeller, compte tenu de la moyenne dans ce genre de construction (pour un groupe de cette taille, environ 4 millions d’euros, ici c’est 7,4 millions €). A ce prix là, on aurait pu intégrer des critères environnementaux ambitieux (autonomie énergétique du bâtiment, au moins partielle) mais là encore : aucune contrainte. Donc on paie à prix d’or un équipement scolaire qui n’est même pas obligé de répondre à des normes environnementales ambitieuses.
Enfin, et c’est là une décision grave que prend la municipalité, le groupe scolaire est placé à un endroit où la pollution des sols est une des plus importantes de l’ensemble du quartier Delage (car à côté de l’ancienne usine), comme l’avait signalé à plusieurs reprises le rapport de l’autorité environnementale, indiquant notamment attendre “des précisions sur la pollution des sols” et rappelant que « les crèches et groupes scolaires doivent être évités sur les sites pollués, conformément à la circulaire du 8 février 2007 relative à l’implantation sur des sols pollués d’établissements accueillant des populations sensibles ».
Or, dans le diagnostic pollution fourni par HSBC, on a bien confirmation d’une pollution des sols à l’endroit du futur groupe scolaire, notamment en sulfate lixiviable et antimoine (qui appartient à la catégorie des métaux lourds). Le protocole prévoit d’engager une dépollution pour un montant de 3,6 millions € mais aucune indication n’a été fournie quant à l’évaluation du coût de dépollution nécessaire pour assurer, en toute sécurité, l’implantation du groupe scolaire à cet endroit. Doit-on croire HSBC sur parole ? Il semblerait que oui selon la mairie qui, en toute tranquillité, se contente de répondre que « si un tel seuil a été fixé dans l’accord, c’est que cela doit suffire.. »... On reste bouche bée devant tant de légèreté, notamment quand il s’agit de la santé des enfants. A ce stade, il ne s’agit plus seulement d’amateurisme mais d’irresponsabilité.
Des ambitions environnementales introuvables…
Qu’il s’agisse du groupe scolaire ou des bâtiments d’habitation que HSBC s’engage à construire, on ne trouve nulle trace dans le protocole d’accord d’une quelconque exigence environnementale. Rappelons tout de même que la mairie affichait comme ambition de faire du futur Village Delage un « écoquartier » innovant, sur un site qui présente de nombreuses sources d’énergies renouvelables et de récupération identifiées.
Pourtant, en dehors des « aménagements paysagers », des « voies de circulations apaisées », des toitures végétalisées, des initiatives de compostage et quelques éléments d’agriculture urbaine, aucun critère environnemental ambitieux n’apparaît dans le protocole concernant le bâti des immeubles d’habitation ou de groupe scolaire.. Nulle trace d’exigence particulière de ce côté, encore moins de certification environnementale. On en déduit que HSBC fera bien ce que bon lui plaira. Tant pis pour l’ambition environnementale.
D’ailleurs, la majorité municipale avait de toute façon abandonné au fur et à mesure les éléments les plus ambitieux : chauffage biomasse, récupération des eaux de pluie, murs végétalisés, utilisation de l’énergie produite par les data centers de la zone, ou panneaux photovoltaïques ne sont plus évoqués depuis longtemps.
Ce protocole vise l’ensemble des parcelles détenues par HSBC (AP72, AP73, AP83, AP84, AQ71 et AQ72) qui représentent environ 70% de l’îlot Paul Bert) et prévoit : Engagements de la ville de Courbevoie et du territoire Paris-Ouest-La-Défense :
Engagements de HSBC :
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