La Ville de Courbevoie mènait une enquête publique concernant la
construction de la Tour Alto, du lundi 2 septembre au vendredi 2 octobre.
Il s'agit d'un immeuble de bureaux de grande hauteur (IGH) place du bâtiment
existant CB32 ("Immeuble des Saisons") que l'on veut construire au 4 place des Saisons. L'immeuble est d'une surface de plancher de 51 181 m² et devant mesurer 110 m (l'équivalent de la hauteur de l'Arche de la Défense).
Voici une contribution à cette enquête :
Malgré ses 500 pages, cette enquête publique n’étudie pas tous les impacts qu’aura la tour Alto sur le quartier et les riverains. Sa méthodologie est souvent peu claire et changeante et le projet s’appuie sur des aménagements hypothétiques. Il est donc difficile d’émettre un avis sur ce projet qui poursuit la fuite en avant du plan de renouveau de la Défense.
Une méthodologie très imparfaite
Les documents présentés se basent sur des hypothèses à schéma variable. Une fois c’est le quartier actuel sert de base, une autre fois c’est le quartier dans les 15 ans avec la construction de plusieurs tours de bureaux et d’hôtel, encore une autre fois c’est uniquement avec les tours Hermitage. Le rédacteur semble choisir les bases de calcul selon le résultat qu’il souhaite obtenir. D’un côté le projet vante l’équilibre habitations/bureaux en oubliant l’impact négatif d’Hermitage sur le nombre d’habitations, de l’autre il explique que la perte d’ensoleillement sera minime puisque Hermitage cachera déjà le soleil à la plupart des constructions. D’un côté le projet explique que les passagers supplémentaires dans les transports en commun seront absorbés grâce aux évolutions futures des transports en commun (Prolongement du T2 vers Colombes, doublement des trains du RER A, nouvelle gare TGV,…) mais dans le même le chiffre des usagers des transports en commun ne prend pas en compte les usagers des futures constructions du quartier.
Il est donc impossible de donner un avis éclairé sur Alto puisque les bases de calcul de son impact dans le quartier changent selon les documents sans méthodologie claire.
De plus le périmètre de l’étude d’impact est tronqué : seul l’impact sur la Défense est étudié ! Les quartiers de Courbevoie ne sont pas pris en compte, une fois la rue Louis Blanc traversée, Alto doit sans doute disparaître. Le reste de Courbevoie n’existe pas dans l’enquête (quel impact sur les autres quartiers, les écoles proches, les parcs, la circulation des rues adjacentes?).
Des aménagements hypothétiques
La construction de la Tour Alto est fortement liée au réaménagement de la rue Louis Blanc. En effet l’enquête publique explique que le projet est basé sur la création d’un nouveau parvis dit place d’Alsace qui relierait la tour à la rue Louis Blanc et au boulevard circulaire. Cet aménagement est mis en avant pour montrer l’évolution positive qu’apporte Alto au quartier en facilitant la circulation des usagers (piétons, voiture,…). Pourtant ces aménagements dépendent non pas d’Alto mais de l’EPADESA. Ce réaménagement est hypothétique dans les documents présentés. Aucune étude de l’EPADESA n’est présentée si ce n’est un vague projet. Il n’est pas donc possible de se prononcer sur l’impact d’Alto dans le quartier.
De la même manière la tour n’aura pas de parking et propose donc l’utilisation des parkings alentour pour accueillir ses futurs utilisateurs. Encore une fois c’est un élément extérieur qui justifie la faisabilité du projet. Or aucun élément clair sur les parkings (taux d’occupation actuelle, aménagement futur avec accord des gestionnaires, création de l’accessibilité pour les vélos pour les places envisagées, …) n’est pas présenté. Il n’est pas donc possible de se prononcer sur l’impact d’Alto sur ce point.
Un déséquilibre bureaux/habitation
Le projet Alto déséquilibre un peu plus le ratio bureaux/habitation de la Défense déjà fortement défavorable pour les logements. Le projet Hermitage, les nombreuses tours récemment construites ou en passe d'être livrées et les hôtels de ce quartier de la Défense entraînent la destruction de logement et l’explosion des m² de bureaux ou d’hôtel qui ne pourraientt être considérés comme des habitations. Rajouter une tour de 51 000m² accentue encore ce déséquilibre, augmentant de fait les transports pendulaires.
L’offre de transport déjà saturée
L’offre de bureaux de la tour de 51 000 m2 fait augmenter le nombre d’usagers des transports de 2 700 personnes. Cette augmentation sur un réseau déjà saturé est évidemment inacceptable non seulement pour les habitants du quartier mais aussi pour tous les usagers des transports de la Défense. C’est particulièrement vrai pour la station Esplanade de la Défense déjà saturée et bientôt utilisée par les usagers d’Hermitage, Maelia…
Ecologie urbaine
La tour Alto vise plusieurs labels dont le HQE (Haute Qualité Environnementale). C’est une amélioration par rapport à l’existant tout comme le recyclage des eaux usées. Toutefois les ascenseurs et l’utilisation de climatisation pour une salle des marchés (à cause des équipements informatiques) ne sont pas pris en compte. Le peu de places de vélos prévues et la destruction programmée du peu de végétation restante font partie des autres aspects environnementaux négatifs pour les Courbevoisiens.
Enfin les documents concernant la possibilité d’utiliser des panneaux solaires sont peu crédibles. L’explication de l’abandon de cette hypothèse montre le peu de volonté réelle des promoteurs du projet : 60m² de panneaux ont été étudiés car il faut maintenir à tout prix une terrasse privative VIP en haut de la tour…
Ensoleillement
La baisse importante d’ensoleillement ne semble pas acceptable pour les habitations proches déjà fortement touchées par les constructions denses et hautes de ce quartier. Aucune étude sur l’ensoleillement des autres quartiers de Courbevoie n’est fournie.
Les futurs tours Hermitage ne doivent pas servir d’alibi à Alto, ni la tour First. Le dossier explique trop souvent qu’entre First et Hermitage, Alto et ses 150m est une broutille. L’impact d’Alto est bien réel et ne doit pas être sous-estimé en invoquant les pires chiffres des autres projets.
Enfin la forme évasée de la tour n’est pas étudiée. Pourtant les rayons du soleil seront renvoyés sur le sol, l’exemple récent de la tour dite « Walkie-Talkie » à Londres a montré que cette forme particulière pouvait avoir un impact important de surchauffe au niveau de la rue et des immeubles voisins. Qu’en est-il pour Alto ?
Les travaux
Le projet a le mérite de prévoir une partie des travaux, d’essayer d’en minimiser les conséquences pour les riverains et de vouloir maîtriser les allers-retours de camion en recyclant en partie des matériaux de construction. Cependant ces travaux sont envisagés en vase clos alors qu’ils seront concomitants avec plusieurs autres projets de construction et notamment Hermitage. Il est indispensable d’étudier la superposition de ces projets et l’impact sur le quartier environnant alors même que le chantier du projet Hermitage causera d’importantes nuisances aux riverains.
Plus globalement
Le projet est présenté comme modèle en matière de prise en compte du développement durable. Il est pourtant impossible de trouver des chiffres concrets sur les économies d’énergie réelles, au regard de la surconsommation d’énergie induite par un bâtiment à vocation essentiellement tertiaire. Si les efforts d’isolation, de ventilation, de recyclage calorique etc. sont tout à fait louables, ils ne doivent pas distordre dans l’esprit des contribuables et citoyens cette réalité : les tours de bureaux sont intrinsèquement des structures énergétivores. Ascenseurs, refroidissement, circulation des flux : tout ceci dépasse largement la capacité de quelques efforts menés ponctuellement !
On pourra enfin s’interroger sur la finalité d’une nouvelle tour de bureaux à la Défense et la surenchère d’un « renouveau » qui n’en est pas un, puisque les campus horizontaux ont la préférence des entreprises avec le départ de grands groupes de la Défense, que le télétravail va augmenter dans les années à venir et que de colossales incertitudes pèsent sur le modèle de développement de nos sociétés et cela à très court terme.
Cet immeuble d'une surface de plancher de 51 181 m², se situe dans le périmètre d'opération d'intérêt national de La Défense.
Elle est très bien cette tour! Vous devriez vous appeler zéro ambition pour Courbevoie!
Rédigé par : jose | mardi 15 oct 2013 à 02h41